Concept-Car au Château de Compiègne
Le Palais de Compiègne est réputé pour sa riche histoire. Aux côtés de Versailles et Fontainebleau, il fait partie des plus importantes résidences royales et impériales de notre pays. En effet, bâti par Louis XV et Louis XVI, il connut les affres de la Révolution, qui amena la dispersion de son riche mobilier. Puis Napoléon Ier et Napoléon III s’y installèrent, apportant leur touche comme il se doit.
Mais pour quelle raison de ce patrimoine, aussi intéressant soit-il, dans un magazine automobile ? Depuis 1927, le château abrite le Musée National de la Voiture. Face à l’évolution extrêmement rapide de la locomotion, celui-ci a eu pour objectif de préserver le patrimoine hippomobile et automobile. Aujourd’hui, la collection comprend une centaine de véhicules hippomobiles, remontant au 17ème siècle pour les plus anciens, et une trentaine d’automobiles.
Concept-Car au Château de Compiègne
Peu connu du grand public, ce musée bénéficie désormais d’une nouvelle dynamique et abrite, pour la première fois, une exposition à thème. Baptisée « Concept car – Beauté pure », elle dissémine à travers les salles du château une trentaine de véhicules.
Parmi ceux-ci, la plus ancienne fait partie des collections du château, à savoir la Jamais Contente de 1899. A ses commandes, son créateur le belge Camille Jenatzy fut le premier à franchir les 100 km/h à bord d’un véhicule automobile. Dans le contexte actuel, cette performance résonne particulièrement car il était propulsé par l’énergie électrique.
Cette exposition peut être structurée en trois périodes.L’avant-guerre est consacrée à la performance, au défi de la nature. Ainsi l’unique exemplaire de Bugatti T28 construit en 1921.
L’incroyable avion sans aile Hélica, produit à moins de 20 moins exemplaires à partir de 1919. Mais produit malgré tout !
Dans cette catégorie des avions qui ne décolleront jamais, la Monaco Trossi de 1935 figure en bonne place. A la première ? Augusto Monaco et Carlo Trossi conçoivent une monoplace autour d’un seize cylindres en étoile, 2-temps. Incroyable mais aussi inconduisible et impossible à mettre au point.
Durant la seconde guerre mondiale et les années d’après-guerre, l’automobile aura d’autres priorités que la performance. Il faut pouvoir avant tout se déplacer en période de pénurie.En 1942, Paul Arzens crée l’Oeuf. Révolutionnaire pour l’époque, cet ORNI (Oeuf Roulant …) exploite l’aluminium et le plexiglas pour tirer le meilleur de sa propulsion … électrique encore une fois. Pour l’anecdote, nous sommes très nombreux à être monté dans une création de cet ingénieur des Arts et Métiers. Il a dessiné de nombreuses locomotrices pour la SNCF, parmi lesquelles les séries CC.La Panhard Dynavia de 1948, par Louis Bionier, et la SOCEMA-Grégoire de 1952 explorent de nouvelles formes, de nouveaux matériaux, de nouvelles énergies, faisant table rase des règles passées. Si elles ne connurent pas le succès, elles sont néanmoins représentatives de la troisième période, qui point.
L’économie devient plus prospère. L’homme conquiert petit à petit l’espace. Et l’automobiliste se voit présenter un futur riant et innovant. La marque Chrysler explore des solutions pour marier aérodynamisme, motricité et propulsion à l’aide d’une turbine. En ayant confié le design à la carrosserie Ghia, le résultat est présenté au salon de Turin en 1955. La Chrysler Ghia Streamline X Gilda est une lame découpant l’air, affûtée. Exhubérante, elle est pourtant loin de ce que l’Amérique produira dans les années suivantes, avec profusion de chrome et de détails.En 1961, cette collaboration américano-italienne aboutit à la présentation de la Plymouth Ghia Asimmetrica Roadster. Moins lisse que le concept précédent, il est beaucoup plus proche des modèles de série, tant par sa ligne que par sa motorisation. Son capot abrite en effet un six en ligne de 2.8 litres, issu de la berline Valiant. Ce concept sera acheté au salon de Genève par Georges Simenon, le père de Maigret.
Que l’on se rassure, les Italiens n’ont jamais eu besoin des Américains pour créer des beautés pures. Ainsi de l’Alfa Romeo Giulietta Sprint revue par Bertone en 1956. Ou de la Fiat Stanguellini 1200 Spider America Bertone en 1957. Ce nom a rallonge cache une Fiat 1100TV, revue en 1200 par l’usine, sur laquelle Stanguellini a revu le châssis tandis que Bertone dessinait une robe aérienne. Cette évocation européenne est à échelle réduite des rêves américains, à l’instar de l’empattement (seulement 2.34m) ou la puissance (à peine 60ch).
L’exposition se termine au tournant des années 60-70. Présentée en 1969, la Mercedes C111-I conjugue notamment carrosserie en fibre de verre, train arrière multi-bras et moteur Wankel à pistons rotatifs. Les générations de C111 se succéderont en embarquant des moteurs essence, Diesel, turbo-Diesel.
Moins connue de ce côté de la Manche, la Vauxhall SRV est une pure maquette regroupant plusieurs innovations. Eléments aérodynamiques mobiles, suspension réglable électriquement, répartition du carburant entre les réservoirs au profit de l’équilibre dynamique.
L’exposition compte de nombreux autres concepts ainsi que quelques motos, qui valent le déplacement. Pour cela, vous avez jusqu’au 23 mars, ce qui vous permettra également de découvrir un cadre exceptionnel.
Pierre-Yves Etienney
Infos : https://chateaudecompiegne.fr/evenement/concept-car-beaute-pure
Plus : https://www.retropassionautomobiles.fr/2020/04/alfa-romeo-24-hp/