LINCOLN CONTINENTAL – Johnson, Nixon et Ford.
Retrouvez cet article en Podcast
Bien qu’à la demande du nouveau président Lyndon Johnson, qui entra en fonction à la mort de Kennedy, la Continental « X-100 » avait été entièrement modifiée, blindée et repeinte, celle-ci restait sans-doute, à ses yeux, trop attachée à l’image de Kennedy et surtout à celle de l’attentat de Dallas.
C’est pourquoi, même s’il continua à l’utiliser à l’occasion de la plupart des grands événements durant sa présidence, comme la visite de chefs d’états étrangers, Johnson décida de commander une nouvelle voiture pour assurer ses déplacements. Il s’agissait toujours d’une Lincoln Continental, mais d’un nouveau modèle, celui du millésime 1965. Les Lincoln de ce millésime se reconnaissant aisément des modèles des années précédentes par sa calandre de forme plate (et non plus convexe comme cela avait été le cas depuis 1961), avec simplement une partie centrale plus proéminente, ainsi que les feux stop, les feux de stationnement ainsi que les clignotants, placés auparavant dans les pare-chocs, étaient maintenant disposés à l’extrémité des ailes, au-dessus du pare-choc. Extérieurement, toutefois, elle ne se différenciait guère des limousines Continental réalisées par Hess & Eisenhardt ou par d’autres carrossiers qui travaillaient en collaboration avec Ford.
Comme pour les voitures « officielles » de la Maison Blanche, elle avait néanmoins reçue un certain nombre d’aménagements spéciaux, dont un équipement radio-téléphone qui lui permettait de joindre à tout moment et où qu’il soit les membres de son équipe à la Maison Blanche ou les responsables militaires du Pentagone, ainsi qu’un mini-bar comprenant des carafes et des verres en cristal installé contre la cloison de séparation intérieure entre le chauffeur et les passagers. Réalisée par le carrossier Lehmann-Peterson à Chicago, cette imposante mais austère limousine noire, contrairement à la Continental « X-100 », était dépourvue de blindage.
Ce qui, de prime abord, peut surprendre, d’autant que le nouveau président Lyndon Johnson, ainsi que les responsables des Services Secrets, se montraient fort inquiets (pour ne pas dire paranoïaques) en ce qui concerne sa sécurité après la mort tragique de Kennedy. Ce choix d’une voiture non blindée, voulu par Johnson, est sans doute dû au fait que la limousine était destinée uniquement aux déplacements privés du président et que, en dehors de la direction et des agents des Services secrets, nul n’était censé savoir que cette voiture était celle du président des Etats-Unis. Les vitres teintées entièrement opaques qui avaient été installées à l’arrière devant suffire à assurer la sécurité ainsi que la confidentialité des passagers et de leurs déplacements. Dans cette même intention, l’intérieur comme l’extérieur de la limousine est dépourvue des sceaux présidentiels que l’on retrouve sur tous les véhicules officiels de la Maison Blanche.
Bien qu’elle soit dépourvue de blindage, cela ne l’empêchait toutefois pas d’afficher plus de 2,7 tonnes sur la balance. Le moteur qui y avait été installé, un V8 de 7 litres développant 390 chevaux, était donc bien utile pour permettre à la Continental « privée » du président Johnson de parvenir le plus rapidement possible à destination. D’autres membres de l’administration Johnson, comme le Secrétaire à la défense Robert McNamara, eurent également une limousine semblable comme voiture de fonction, avec toutefois quelques différences d’aménagement intérieur, notamment une télévision (en noir et blanc) placée dans un meuble fixée contre la cloison intérieure.
Lors de son arrivée des Etats-Unis, en 1969, Richard Nixon décida de renouveler une grande partie de la flotte de véhicules de la Maison Blanche. Tout comme ses prédécesseurs, il resta toutefois fidèle à la marque Lincoln.
Si une règle, certes non écrite mais qui avait néanmoins force de loi, avait été établie après l’assassinat de Kennedy, stipulait que le président ne devait plus voyager en voiture décapotable, que ce soit pour ses déplacements officiels ou privés, en revanche, cette règle ne s’appliquait qu’au chef de l’Etat et ne concernait donc pas les autres membres de son administration. Ni les agents des services Secrets non plus.
En plus d’une nouvelle limousine, le carrossier Lehmann-Peterson reçut ainsi commande, en 1966, de deux voitures de sécurité destinées aux agents chargés de la protection directe du président. Il s’agissait de deux berlines décapotables qui avaient reçues toute une série d’aménagements spéciaux.
Les plus visibles étant des marche-pieds très longs et les larges installés devant les portières, des montants fixes placés sur les parties supérieures des portières et dont les formes, à l’avant, étaient calquées sur celles des vitres (permettant ainsi au conducteur de conserver, sur les flancs de la voiture, la meilleure visibilité possible). Ceux-ci étaient divisés, de chaque côté, en deux parties afin de permettre aux portières (Celles de l’arrière conservant un système à ouverture antagoniste, comme sur le modèle de série) de s’ouvrir normalement et avec le plus de facilité possible. Le pare-choc arrière était, lui aussi, articulé, de manière à pouvoir basculer vers le bas et former ainsi une plate-forme où les gardes du corps pouvaient prendre place.
Sur le coffre avait été installé une grande barre de maintien rétractable qui, lorsqu’elle était déployée, arrivée à la hauteur du pare-brise, et qui courait sur toute la largeur de la voiture. Lorsque celle-ci ne servait pas, l’imposante barre de maintien était rabattue, en s’intégrant parfaitement à la malle du coffre. La capote (qui avait été rehaussée pour des raisons de visibilité et aussi afin que les occupants de la voiture puissent monter et descendre plus facilement), recouverte de vinyle noir, avait, elle aussi, reçue un traitement spécial. Sur son toit avait, en effet, été aménagé un toit ouvrant en plexiglas (divisé en trois parties pour permettre à la capote de se déployer et de se replier plus facilement), afin d’offrir le meilleur éclairage possible.
Durant toute la durée de la présidence de Nixon, ces deux Lincoln décapotables spéciales firent systématiquement partie du cortège présidentiel lors de chaque sortie officielle du président.
En plus d’une limousine construite sur le châssis (rallongé) d’une Continental de l’année-modèle 1969, qui avait été commandée par Johnson à la fin de son mandat, une nouvelle Lincoln Continental, destinée elle aussi à l’usage du président Nixon, fut également commandée par les services de la présidence en 1972
D’une longueur déjà fort imposante sur le modèle de série (5,72 mètres) et d’un poids qui l’était tout autant (près de 2,4 tonnes), celle-ci atteignit des proportions encore plus colossales lors de sa transformation en limousine : 6,7 mètres ! Comme pour ses devancières, bien que le V8 qui avait trouvé place sous son capot affiche pas moins de 7 500 cc, ses 214 chevaux avait néanmoins plutôt fort à faire pour mouvoir dignement ce char d’assaut dont le poids devait avoisiner voir même dépasser les trois avoisinait les six tonnes !
Comme pour les voitures du parc de la Maison Blanche qui l’avaient précédé et comme cela avait été le cas pour les autres limousines qui l’avaient précédé, la nouvelle Lincoln présidentielle se devait d’offrir une protection optimale, en recevant ce qui se faisait de mieux à l’époque en matière d’équipements de sécurité.
Pour cette raison, sa réalisation demanda toutefois un délai assez long et la voiture ne fut finalement prête qu’en 1974. Nixon n’en profita guère longtemps, car, au mois d’août de cette année-là, il fut contraint de démissionner à cause de la célèbre affaire du Watergate (qui s’était produite deux ans plus tôt).
Ce furent donc surtout ses successeurs, son ancien vice-président Gerald Ford et ensuite, à partir de 1977, Jimmy Carter, qui l’utilisèrent lors de leurs déplacements officiels. En plus de la Lincoln Continental utilisée par ses prédécesseurs, ce dernier fit également commander et réaliser une limousine Cadillac. Si celle-ci, construite sur le châssis de la Série 75 Fleetwood, ne se différenciait guère, extérieurement en tout cas, des limousines proposées au catalogue Cadillac, sa carrosserie fut, évidemment, entièrement blindée afin de garantir une protection optimale au président et à son épouse.
Comme ce fut le cas pour la « X-100 » de Kennedy, la nouvelle Continental était louée par Ford à la Maison Blanche pour un montant annuel de 5 000 dollars (L’équivalent d’un peu moins de 24 000 dollars).
Parmi les équipements spéciaux dont avait bénéficié la voiture, destiné à l’usage du président ainsi que des agents des Services Secrets, outre le blindage intégrale de la carrosserie et les vitres pare-balles, se trouvaient des microphones externes qui permettaient aux occupants de pouvoir entendre les bruits extérieurs (Notamment les acclamations de la foule lors des défilés officiels), ainsi que des coffres et autres espaces de rangements destinés au rangement des armes des gardes du corps.
En 1978, l’avant fut modifié afin de rajeunir la voiture. Elle reçue alors les éléments de carrosserie des Continental de l’année-modèle. C’est sous cette forme qu’elle poursuivit sa carrière sous la présidence de Reagan.
Cette Lincoln Continental est entrée dans l’histoire pour avoir été la voiture à bord de laquelle voyageait le président Ford lorsqu’il fut victime d’une tentative d’assassinat alors qu’il se trouvait en déplacement à San Francisco, le 22 septembre 1975. Un évènement qui survenait d’ailleurs après qu’une autre tentative d’assassinat contre le président ait déjà eu lieu, 17 jours plus tôt, à Sacramento. C’est également cette même voiture qu’utilisa Ronald Reagan lorsqu’il fut, à son tour, victime d’une tentative d’assassinat, le 30 mars 1981, alors qu’il venait de prononcer une allocution à l’hôtel Hilton de Washington.
Philippe ROCHE
Photos droits réservés
D’autres articles ici https://www.retropassionautomobiles.fr/
Notre chaine YouTube https://www.youtube.com/channel/UCdnjRO4CUpmk_cUsI5oxs0w?view_as=subscriber