FORD TRANSIT-Utility All Over The World.
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A la fin des années 1940, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, en plus d’être déjà devenu l’un des plus importants constructeurs automobiles américains, Ford peut également se targuer d’être celui qui possède la plus forte assise sur le marché européen. Ceci, avec des filiales présentes au Royaume-Uni, en Allemagne et en France. Cette dernière, jugée insuffisamment rentable – et aussi à cause de la situation politique en France, où l’influence des socialistes et communistes sur la scène politique est jugée trop importante et dangereuse par les dirigeants du constructeur – sera revendue à Simca en 1954.
A l’époque, chaque filiale fonctionne toutefois indépendamment des autres et presque en « vase clos », produisant donc ses propres modèles pour le marché intérieur. Lesquels ne partagent donc, la plupart du temps, ni leurs châssis ou leurs moteurs et très peu de pièces en commun. Si les Ford allemandes et anglaises sont donc avant-tout produites à destination pour leur marchés nationaux, elles sont également vendues à l’exportation sur les marchés dépourvues d’industrie automobile locale. Avec pour résultat que, dans les pays concernés, le public se voient ainsi proposer deux gammes de modèles – officiant dans la même catéorie et souvent comparable aux niveaux des prix et des performances – portant toutes deux le nom de Ford.
Ce qui, évidemment, va souvent s’avérer préjudiciable pour l’une comme pour l’autre et, vu depuis le siège de la maison-mère du constructeur – à Dearborn, près de Detroit – apparaît même comme une concurrence stérile. Il est vrai que, à l’échelle du marché américain, celui de l’Allemagne et du Royaume-Uni, même réunis, ne pesaient pas vraiment grand-chose.
C’est pourquoi, dans les années 60, il est finalement décidé de fusionner celles-ci en une seule et même filale, baptisé Ford Europe, dont le siège sera installée à Cologne, en Allemagne. Les usines anglaises devront donc, désormais, se contenter de produire des modèles quasiment identiques à ceux sortant des chaînes d’assemblage des usines allemandes – même les Ford « made in England » conservant toutefois plusieurs motorisations spécifiques, ainsi que des finitions et présentations intérieures spécifiques afin de s’adapter au mieux aux goûts des acheteurs britanniques.
Le premier modèle ainsi de cette nouvelle politique de rationalisation et de gamme commune ne sera toutefois pas une voiture de tourisme mais un utilitaire : le fourgon Transit.
Sur un marché européen alors en pleine mutation – avec la suppression rapide des barrières douanières et du protectionnisme d’avant-guerre, conséquence de l’intégration de l’Allemagne fédérale au sein de la nouvelle Union Européenne -, la nouvelle direction de Ford Europe a bien conscience que, tant en ce qui concerne les voitures particulières que les utilitaires, il est primordial de proposer des modèles « internationaux ». C’est-à-dire qui puissent correspondre aux besoins d’un large public, dans quasiment tous les pays d’Europe (occidentale), en ne nécessitant ainsi, éventuellement, que des modifications assez légères afin de s’adapter aux législations ainsi qu’aux attentes des différents pays en question.
Afin de pouvoir répondre, justement, aux demandes de tous les publics visés, le nouveau fourgon « européen » de Ford est prévu, dès le départ, pour être décliné en un grand nombre de versions. En proposant ainsi, non seulement, un grand nombre de carrosseries mais qui seront aussi réalisées – pour la plupart d’entre-elles – sur un châssis avec différentes longueurs d’empattement. Fourgon vitré ou tôlé, minibus à 6, 9 ou 12 places – grâce à l’adjonction d’un porte-à-faux arrière rallongé pour ce dernier, avec ou sans toit surélevé ; châssis-cabine à simple ou double cabine ; plateau bâché ou découvert avec benne basculante en option, etc. Avec une gamme fort exhaustive, les acheteurs potentiels – qu’il s’agisse de particuliers ou d’entreprises – peuvent ainsi trouver aisément le véhciule qui corresponde exactement à leurs besoins. Sur le châssis « normal », l’empattement est de 2,69 m, une longueur qui est porté à 3 mètres sur la version à empattement long. Lorsque l’acheteur opte également pour l’option du toit surélevé, l’espace de l’habitacle se voit alors porté de 5,4 à 10,60 mètres cubes. Avec un tel volume habitable et de chargement, le fourgon ou minibus transit n’a alors plus grand-chose à envier à ses homologues américains, tout en étant beaucoup mieux adapter aux usages et aux routes européennes grâce à son gabarit qui – même dans cette version – reste plus « raisonnable » ainsi que par ses motorisations bien plus économiques en carburant.
Comme il est alors en usage au sein des filiales européennes des constructeurs américains, les styles des modèles est étroitement inspiré de ceux produits en Amérique, non seulement pour les voitures de tourisme mais aussi, bien souvent, pour les utilitaires. A l’image de son homologue au sein de la gamme américaine de Ford, le fourgon Serie E – rebaptisé plus-tard l’Econoline -, le Transit se caractérise ainsi par son vaste pare-brise panoramique, son capot court, ses phares à visière encadrant une large calandre dont les moulures débordent largement sur les flancs et intégrent deux clignotants de gros diamètre. A l’intérieur, la largeur du véhicule, sensiblement plus grande que sur uen voiture de tourisme, a permit d’installer trois places de front, qui peuvent accueillir trois adultes de grande taille dans un confort.
Outre le fait qu’il est le premier modèle produit en commun au sein des usines anglaises et allemandes du groupe, le Transit marque aussi une étape importante au sein de l’histoire de la marque à l’ovale bleu en Europe car il est permet aux utilitaires Ford d’entrer dans l’air moderne. Il est vrai que celui-ci ne pouvait se permettre de rester plus longtemps les bras croisés face à une concurrence qui, dans ces deux pays comme en France ou en Italie, avait déjà commercialisé toute une série d’utilitaires légers qui ont immédiatement remporté un large succès auprès de la clientèle. Plus modernes – aussi bien sur le plan technique qu’esthétique, plus confortables et mieux équipés que leurs prédécesseurs, ils constituaient, à bien des égards, une sorte de « chaînon manquant » entre les versions breaks des voitures de tourisme et les véhicules purement utilitaires, en réunissant une grande partie des avantages des uns et des autres. Des modèles suffisamment maniables – en tout cas lorsqu’ils n’étaient pas à pleine charge – et facile d’utilisation pour être conduits par n’importe – y compris donc par ceux qui n’avaient jamais conduit, jusque-là, que des voitures ordinaires.
En France, Citroën avait ouvert la voie, juste avant la Seconde Guerre mondiale, avec le TUB et ensuite, à partir de 1948, avec son successeur, le Type H ; Peugeot lançant aussi, bientôt, de son côté, le fourgon D3 – si Renault mettra un peu plus de temps à « se mettre à la page », l’Estafette remportera, elle aussi, dès son lancement en 1959, un grand succès. En Allemagne, Volkswagen présentera, à la même époque, son célèbre Kombi. Même l’industrie britannique – pourtant réputé pour son conservatisme érigé en vertu cardinale, s’y joindra elle aussi, à la même époque que la marque au losnage, entre autres avec le Commer FC.
Face à une concurrence de plus en plus nombreuse, la division européenne de Ford se devait donc de réagir. A l’image de ce qui se pratique d’ailleurs sur les modèles de la production américaine – voitures comme utilitaires – Ford demeure – fermenet – ancré dans le clacissisme ou l’orthodoxie technique la plus pure. Même s’il est vrai que ce conservatisme, qui semble alors inébranlable, est beaucoup moins rhédibitoire sur un utilitaire. Ford préférant, en effet, jouer la carte de la robustesse et de la facilité d’entretien, en ayant recours à des solutions techniques simples et éprouvées. Fidèle en cela à sa réputation qui – outre sa puissance commerciale et l’importance de son réseau, implanté aux quatre coins de la plupart des pays d’Europe occidentale – lui a permit de devenir l’un des plus importants constructeurs européens. Le Transit est ainsi bâti autour d’un robuste châssis à longerons, les suspensions sont composées de classiques ressorts à lames, la transmission s’effectue toujours aux roues arrière – alors que ses concurrents français, que ce soit chez Citroën, Peugeot et Renault, eux, s’étaient déjà convertis à la traction avant.
Côté moteur, là aussi, la clientèle traditionnelle de Ford n’est absolument pas dépaysée, puisque l’on retrouve, sous le capot du Transit, le classique V4 – l’une des rares originalités techniques des modèles Ford de l’époque, celui-ci étant alors, à l’exception de Lancia, le seul grand constructeur à adopter l’architecture en « V » sur ses moteurs à quatre cylindres. Un moteur déjà bien connu car déjà montés sur la plupart des voitures de tourisme produites à l’époque par le constructeur, notamment sur la Taunus ainsi que les versions d’entrée de gamme du coupé Capri. Bien que disponible, comme sur ces dernières, en plusieurs cylindrées, outre le fait que le public français soit aussi « cocardier » – ou « chauviniste », selon le point de vue -, le Ford Transit se trouvait aussi pénalisé, sur le marché hexagonal, par l’absence de motorisations Diesel. La fiscalité de l’époque favorisant, déjà à l’époque, en France, les véhicules au gazole. Il faudra attendre jusqu’en 1975 – soit pas moins de dix ans après le lancement de la première version du Transit – pour qu’une version Diesel soit finalement intégrée au catalogue.
Grâce à ses lignes modernes, bien que très classiques, cette première version connaîtra une longue carrière qui durera jusqu’en 1978, soit pendant treize ans. La seule évolution notable que connaîtra cette première génération du Ford Transit sur le plan esthétique sera un lifintg de la face avant, avec des logements de phares de forme carrée abaissés et placés au même niveau que la calandre ainsi que des ailes avant épousant la forme du capot. Le reste de la ligne du véhicule demeurant, quant à elle, presque inchangée, ce simple facelift permettant à cette nouvelle version de poursuivre sa carrière jusqu’en 1986. Ce n’est, finalement, qu’à cette date que la nouvelle et seconde génération du fourgon Transit sera finalement dévoilée.
S’il sera, lui aussi, produit en très grand nombre, ni cette nouvelle gmouture ni celle qui suivront ne connaîtront une carrière aussi longue que la génération originelle, laquelle aura été produite, au total, à plus de deux millions d’exemplaires – toutes versions et pays confondus. Un succès qui ne s’est jamais démenti pour le Transit, non seulement en Angleterre et en Allemagne mais aussi dans le reste de l’Europe et maintenant même à l’autre bout du monde. Depuis 2014, il est, en effet, aussi assemblé aux Etats-Unis – la cinquième et actuelle génération ayant, en effet, été conçu en collaboration entre les divisions euroépennes et américaines de Ford –, où elle finalement pris la succession du vénérable Série E Econoline et même en Australie. Devenant ainsi, au sein du programme de production du groupe Ford, un véritable véhicule mondial !
Philippe Roche
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