BUICK 1946 – 48 – Mieux qu’une Cadillac ?

Au sein de la hiérarchie du groupe General Motors, la marque Buick occupe la seconde marche du podium (tant sur le plan de l’image de marque que des tarifs), juste derrière Cadillac. Bien qu’elle figure parmi les firmes « fondatrices » de la GM, à partir du début des années 30, Buick va devoir, d’une certaine manière et, en grande partie, vivre dans l’ombre de Cadillac, celle-ci (lassée d’être trop souvent éclipsée par ses concurrents tels que Packard, Peerless ou Pierce-Arrow, pour ne citer que ces derniers) va alors « marquer un grand coup » en présentant deux nouvelles séries de prestige. Motorisées, l’une, par un moteur V12 (sans doute inspirée par l’exemple de son concurrent Packard, lequel avait été le premier constructeur au monde à produire en série ce genre de mécanique) et l’autre, rien de moins que par un moteur de… seize cylindres (dans l’objectif évident de surclasser ses concurrents alors que les moteurs « multicylindres » étaient à la mode au sein des constructeurs de haut de gamme).

Buick, de son côté, devant alors se contenter de jouer, en quelque sorte, les « seconds couteaux » sur ce marché ou, malgré (voire surtout) à cause de la crise économique qui ravage alors l’Amérique, la concurrence reste fort âpre. Même s’il est vrai que, dans les faits, bien que son image, dans l’esprit d’une grande partie du public, soit celle d’une marque assez prestigieuse, Buick est plus ce que l’on appellerait un constructeur « généraliste », à l’image de Chrysler, les modèles d’entrée de gamme des deux firmes se situant d’ailleurs à un niveau assez similaire.

Sans doute est-ce le fait que ses modèles à six et huit cylindres couvrent une grande partie du marché américain (outre le fait d’appartenir à ce qui est déjà à l’époque le plus important groupe automobile américain) qui lui permettre de traverser sans trop de difficultés et de soucis. (Même si, comme l’ensemble des constructeurs, Buick connaîtra, à certains moments, des années plutôt noires, voyant ainsi sa production, qui atteignait encore un peu plus de 119 000 exemplaires en 1930 à seulement 40 600 trois ans plus tard, la marque n’ayant alors plus enregistré un aussi mauvais score depuis 1914. En parvenant toutefois à remonter au-dessus de la barre, fort symbolique, des 100 000 voitures par an dès 1935 et dépassent même les 231 000 exemplaires en 1939).

Dans la seconde moitié des années 1930, les carrosseries des Buick arrondissent les angles (au sens propre), elles restent, malgré tout empreintes d’un très grand clacissisme, à l’image des modèles de la marque Cadillac. La clientèle à laquelle elle s’adresse, qu’il s’agisse de la « petite » ou de la « grande bourgeoisie » restant assez conservatrice, pour une grande partie d’entre-elle, concernant ses goûts ainsi que ses attentes en matière d’esthétique automobile. Celle-ci restant donc assez rétive à la nouvelle mode du streamlining, incarnée, entre autres, par la Lincoln Zephyr. Malgré la réussite et le caractère avant-gardiste de son style, la direction ainsi que les clients de la marque ne semblent pas encore prêts à franchir le pas.

A la même époque, au sein de l’état-major de General Motors, un homme est toutefois décidé à faire souffler un vent nouveau, non seulement, au sein de la marque Buick mais aussi des autres divisions du groupe : Harley Earl, le directeur du bureau de style de la GM. Ce dernier est, en effet, décidé à révolutionner, ou, tout au moins, à « dépoussiérer » l’image, un peu trop « guindée » à ses yeux, de la marque. Le « vent du renouveau » arrive en 1938 sous la forme d’un show car qui reçoit l’appellation « Y-Job », qui, bien que reprenant le châssis d’une Buick Roadmaster (la série haut de gamme de la marque) de ce millésime, se caractérise par une silhouette nettement plus imposante et massive que celle des modèles proposés au même moment par le constructeur.

BUICK 1946 – 48 - Mieux qu'une Cadillac ?
BUICK CENTURY 1942

Celle-ci n’étant pas sans évoquer, vue sous certains angles (vue de face, des 2/3 ou 3/4 avant ainsi que de profil) celle d’un cétacé tel qu’un cachalot ou même d’une baignoire renversée, (des termes ou surnoms qui seront d’ailleurs repris par les détracteurs de ce nouveau courant esthétique, y compris par certains commentateurs de la presse automobile, preuve que celui-ci mettra un certain temps à se faire accepter, surtout à ses débuts). Le dessin de la partie arrière, de son côté, avec son extrémité se terminant en forme de pointe n’était pas sans évoquer fortement les roadsters « boat-tails » réalisés sur les châssis des marques les plus prestigieuses, en particulier Auburn et Packard, si prisés par les stars d’Hollywood et autres célébrités de l’époque.

Si elles ne sont donc pas dépourvues (surtout vu avec le regard de l’époque) d’une certaine « lourdeur », outre un modernisme évident qui entendait tourner définitivement la page de l’ère des « caisses carrées », reflétaient aussi une véritable recherche aérodynamique (même s’il est vrai que l’on reste encore très loin de celui d’une voiture de course). Ce qui est alors assez novateur à une époque où, aux Etats-Unis comme ailleurs (et sans doute plus encore sur les automobiles de prestige que sur les modèles populaires), l’esthétique primait clairement sur la fonctionnalité des formes.

Un autre élément qui distingue aussi la Buick Y-Job des voitures contemporaines sont ses phares rétractables, eux aussi assez avant-gardistes (d’autant qu’avant elle, les seuls modèles de série à en avoir été équipés étaient les Cord 810 et 812) mais qui ne seront, toutefois, pas retenus sur les prochaines Buick ni sur les autres modèles produits par la GM de la décennie suivante (la faute, semble-t-il, aux ingénieurs du groupe d’être parvenus à trouver un système, électrique ou mécanique, qui soit suffisamment fiable).

Dans l’histoire de l’industrie automobile américaine, le roadster Y-Job peut d’ailleurs être considéré comme le premier vrai show-car, c’est-à-dire un prototype qui, comme son nom l’indique, était destiné à être exposé dans les Salons et autres manifestations dédiées à l’automobile, afin de tester les réactions du public face à celui-ci et de parvenir ainsi, incidemment ou de manière indirecte, à connaître les attentes de celui-ci sur l’esthétique des voitures que celui-ci souhaiterait pouvoir acquérir et conduire dans les années à venir. Il faut, en effet, mentionner que, jusqu’ici (en dehors, probablement, de quelques rares exceptions notables) les prototypes créés par tel ou tel constructeur restaient, le plus souvent, confinés dans le secret des ateliers des bureaux d’études et n’en sortaient qu’à de rares occasions et uniquement pour des séances d’essais sur des circuits ou routes d’essais appartenant aux constructeurs concernés et dont le parcours était souvent aussi étroitement surveillé afin d’éviter les regards et les photographies indiscrètes des journalistes de la presse automobile.

S’il aura ainsi amplement l’occasion de faire admirer ses formes dans les différents Salons automobiles organisés aux quatre coins de l’Amérique, à l’image de la plupart des prototypes (à l’époque et aujourd’hui), la Y-Job recevra, de manière assez régulière, une série de modifications au fil du temps (plus ou moins importantes suivant les cas), notamment afin de tester les nouveaux accessoires (moulures chromées et autres éléments d’accastillage) créés par le bureau de style, non seulement pour les Buick mais aussi pour les modèles des autres divisions du groupe GM). Il sera également utilisé par Harley Earl lui-même comme voiture de fonction durant plusieurs années et est aujourd’hui exposé au sein du Musée de la General Motors à Detroit.

L’enthousiasme de l’accueil du public confortera ce dernier dans la conviction que le nouveau style « semi-ponton » (« semi » car les ailes avant et arrière se détachent encore, assez distinctement, du reste de la carrosserie, même si elles en reprennent souvent les formes générales) indiquait clairement la voie à suivre pour les modèles qui seraient commercialisés par la GM au début de la nouvelle décennie. Les modèles de la marque Cadillac (étant donné que celle-ci se situe au sommet de la hiérarchie du groupe) seront les premiers à en bénéficier, à partir de l’année-modèle 1941 et ceux de Buick dès le millésime suivant.

Les Buick de l’année-modèle 1942 ne connaîtront toutefois qu’une existence fort courte : moins de quatre mois seulement, entre octobre 1941 et février 1942. L’entrée en guerre des Etats-Unis, après le raid des Japonais sur Pearl Harbor, venant interrompre, de manière brutale, la production des voitures de tourisme, chez Buick comme de l’ensemble des constructeurs américains. Ceux-ci se voyant alors obligés de reconvertir leurs usines pour la production en grande série de poids lourds et de chars d’assaut.

Après la capitulation du Japon, à la fin de l’été 1945, le redémarrage de la production ne se fera, dans un premier temps, que de manière assez progressive, les mesures de rationnement des matières premières (notamment celles concernant l’acier et le caoutchouc) mettront, en effet, plusieurs mois à être levées). Sans compter que la grande majorité des constructeurs n’avaient pas présagé l’ampleur de la demande en voitures neuves de la part du public au lendemain de la cessation des hostilités. Celle-ci étant due, à la fois, au fait que dans la société très matérialiste (voire consumériste) qu’allait devenir l’Amérique de l’après-guerre, l’acquisition d’une nouvelle voiture neuve représente, aux yeux d’un grand nombre d’Américains, l’une des meilleures façons de tourner la page des années sombres de la guerre, ainsi, avant celle-ci, que de celles de la Grande Dépression.

Dans cette seconde moitié des années 1940 et jusqu’à la fin de la décennie suivante, les Etats-Unis connaîtront, en effet, une prospérité qu’ils n’avaient plus connu depuis la crise de 1929 et tous les Américains, non seulement ceux des classes aisées mais aussi ceux de la classe moyenne ne vont, évidemment, pas manqué d’en profiter amplement. Durant les deux ou trois premières années de l’après-guerre, au sein de la marque Buick comme de l’ensemble des divisions de General Motors, la préoccupation majeure sera de pouvoir satisfaire, le plus rapidement et le plus efficacement possible, une demande nettement supérieure aux capacités de production des constructeurs, y compris ceux des grands groupes de Detroit.

C’est pourquoi, bien que les bureaux d’études des constructeurs (qui, eux aussi, furent mis à contribution pour soutenir l’effort de guerre, devront, dès lors, se consacrer à l’étude des nouveaux véhicules destinés à l’Armée américaine) aient commencé l’étude des futurs nouveaux modèles dès que l’autorisation officielle fut accordée par le gouvernement fédéral, à la fin de l’année 1944, ceux-ci devront attendre encore quelque temps avant de pouvoir être mis en production.

En tout état de cause, la dernière génération des modèles produits avant le déclenchement du conflit n’avaient, pour la plupart d’entre-eux, qu’un peu plus d’un an et, même dans certains cas, que quelques mois d’existence avant de voir leur carrière interrompue. Or, l’habitude en vigueur au sein de la grande majorité des constructeurs, était de changer complètement les lignes de leurs modèles tous les trois ou quatre ans (même si, en ce qui concerne les constructeurs indépendants, ces derniers ne disposant, évidemment pas des mêmes moyens, que les grands groupes, ces intervalles sont souvent plus longs). Les dirigeants des constructeurs concernés estiment donc, pour cette raison, que ces anciens pourraient donc tout à fait prétendre à une nouvelle et seconde carrière. D’autant que cela leur donnerait ainsi l’opportunité d’engranger des profits considérables et, en grande partie, inespérés sans avoir à investir (pour le moment, tout au moins), à nouveau, des montants assez conséquents pour les productions de modèles recevant des carrosseries entièrement redessinées.

Outre le fait que les Américains ont très vite retourné un amour pour l’automobile qui, en réalité et malgré les années de guerre, ne les avait jamais vraiment quittés, s’ils s’empressent de retourner chez leurs concessionnaires pour passer commande d’une nouvelle voiture dès que la possibilité leur en est donnée, s’est avant tout afin de pouvoir remplacer les anciennes. Lesquelles ont souvent assez durement souffert des carburants de mauvaise qualité ainsi que des difficultés (ou, parfois même, de l’impossibilité d’assumer un entretenir scrupuleux et régulier à celles-ci. Une situation qui concerne quasiment tous les types de clientèles, aussi bien celles des véhicules populaires que des modèles de prestige. Les acheteurs, quel que soit leur budget, ne se montrant guère exigeants et se montrant près à acheter n’importe quel modèle qui soit dans leurs moyens, pourvu que les voitures proposées soit neuves et donc prêtes à parcourir les kilomètres pendant de longues années.

Lorsque les « nouvelles » Buick sont dévoilées au public, à l’automne 1945, celles-ci n’ont, en réalité, rien de vraiment nouveau puisqu’il s’agit, en réalité, des mêmes modèles que ceux du millésime 1942. Comme mentionné précédemment et même dans ces premières années d’après-guerre, Buick reste un conducteur généraliste (même s’il conserve une image assez prestigieuse) et il n’est donc pas véritablement nécessaire de disposer d’une petite fortune pour avoir la possibilité de rouler au quotidien au volant d’une Buick.

Les modèles les moins chers de la gamme, ceux de la Série 40 Special, étant, en effet, affichés entre 900 et 1 000 dollars, les plus luxueux et donc les plus chers dépassant, quant à eux, les 2 500 dollars. A quelques rares exceptions près, la gamme reste quasiment identique à celle de la (courte) année-modèle 1942, qu’il s’agisse des différentes séries ainsi que des modèles (c’est-à-dire les carrosseries) que l’on retrouve au sein de celles-ci. Outre la série 40 Special d’entrée de gamme, le catalogue Buick du millésime 1946 comprend ainsi également les séries 50 Super et 70 Roadmaster. Les séries 60 Century 90 Limited (cette dernière représentant auparavant le haut de gamme de la marque), de leur côté, ne seront pas reconduites après la fin du conflit, ce rôle étant donc, désormais, dévolu à la série Roadmaster.

BUICK 1946 – 48 - Mieux qu'une Cadillac ?
BUICK SERIE 70 ROADMASTER SEDAN 1946

Bien qu’elle soit la série la plus produite, car proposant les modèles les moins chers de la gamme, la série 40 Special ne comprend toutefois que deux carrosseries : les berlines deux et quatre portes (à noter que la première citée reçoit l’appellation Sedanet, laquelle sera également utilisée par un grand nombre d’amateurs pour désigner la carrosserie similaire qui sera proposée à la même époque sur les modèles de la marque Cadillac, même si, dans le cas de cette dernière, cela ne sera toutefois jamais une appellation officielle).

La série 50, qui se voit confier le rôle de série « intermédiaire » ou de milieu de gamme, est, en quelque sorte, un « hybride », en ce sens que les modèles de cette série reprennent les carrosseries (sedan, « Sedanet », convertible et station wagon) de la série haut de gamme Roadmaster mais avec la motorisation ainsi que les équipements, accessoires et garnitures intérieures de la série 40.

La série 70 Roadmaster occupant, à présent, le rôle de « vaisseau amiral » de la gamme Buick, avec (de manière assez logique, comme expliquée précédemment) les mêmes carrosseries que sur la série 50. Les châssis sur lesquels sont produites ces trois séries affichant une longueur d’empattement s’établissant, respectivement, à 3,07m pour la série 40 Special ; 3,15 m pour la série 50 Super et 3,28 mètres. Outre leurs dimensions extérieures ainsi que leur niveau de finition, les différentes séries se différencient également par les motorisations que l’on retrouve sous leur capot.

BUICK 1946 – 48 - Mieux qu'une Cadillac ?
BUICK SERIE 70 ROADMASTER 1946

Si toutes sont équipées d’un moteur huit cylindres en ligne, c’est, toutefois, au niveau de la cylindrée et de la puissance que celles-ci s’en différencient : les séries 40 et 50 recevant ainsi un bloc de 4,06 l développant 110 chevaux, celui de la série 70, de son côté, affichant une cylindrée de 5,24 litres et une puissance de 144 chevaux. Recevant la dénomination « Fireball », le moteur, s’il conserve toutefois, dans l’ensemble, une architecture assez classique, se distingue néanmoins par sa culasse équipée de soupapes en tête, alors que dans ces premières années d’après-guerre, la grande majorité des constructeurs américains demeurent encore fidèles au principe de la distribution à soupapes latérales (que les derniers d’entre-eux n’abandonneront qu’au milieu des années 50).

En ce qui concerne l’alimentation, les modèles de la série Roadmaster se différencient, en outre, de ceux des autres séries par son nouveau système comprenant un seul carburateur à deux corps, lequel remplace désormais les deux carburateurs de marque Downdraft qui équipaient les modèles d’avant-guerre, car celui-ci s’était révélé peu fiable à l’usage. Avec pour conséquence une baisse sensible de la puissance qui s’établissait auparavant à 165 chevaux.

Pour en revenir à l’imposant bloc-moteur qui trône sous le capot des Buick de la seconde moitié des années 1940, les origines de celui-ci remontent déjà au début des années 30 et bien qu »il ne sait donc pas véritablement un exemple de modernité ni de sophistication d’un point de vue technique (avec sa culasse détachable en forme de L et son arbre à cames latéral), outre une grande robustesse et une fiabilité toute aussi grande, ainsi qu’en plus d’une puissance assez « respectable » pour l’époque, une très grande souplesse d’utilisation lui conférant un très grand agrément au volant, quelle que soit la vitesse de la voiture. Ce qui est bien là l’une des qualités essentielles que la clientèle est en droit d’attendre d’une voiture américaine de cette classe, qui se voulait (presque) l’égale des Cadillac et des Lincoln.

Malgré l’âge déjà assez avancé de sa mécanique, celle-ci, comme expliqué plus haut, peut se vanter d’être l’une des rares à être déjà équipée de soupapes en tête, ce que le constructeur ne se prive d’ailleurs pas de rappeler avec l’inscription « valve in head » (les Buick pouvant, à ce titre, revendiquer un atout important face à leurs « cousines », mais néanmoins rivales, de chez Cadillac, ces dernières conservant encore, jusqu’au millésime 1949, une motorisation équipée de soupapes latérales, laquelle n’est d’ailleurs guère plus jeune que le moteur Buick, puisque son lancement remontre, quant à lui, à la fin des années 1920). Bien qu’ils conservent encore des qualités réelles, les ingénieurs ainsi que la direction de General Motors ont toutefois bien conscience que ces motorisations, aussi bien dans le cas de Buick que de Cadillac, ont fait leur temps et qu’elles doivent désormais céder leur place à des moteurs plus modernes. Ceux-ci entreront en scène à l’automne 1948.

BUICK 1946 – 48 - Mieux qu'une Cadillac ?

Quant à la transmission, si les Buick conservent encore, au sortir du conflit, les traditionnelles boîtes de vitesses mécaniques d’avant-guerre, sur les modèles de la marque (comme sur les Cadillac), celles-ci ont toutefois été conçues afin de pouvoir apporter la plus grande facilité et le plus grand confort d’utilisation possible. Qu’elles soient carrossées en limousines ou en cabriolets, les belles américaines de cette époque (contrairement à certaines voitures européennes de prestige telles que les Rolls-Royce) sont, en effet, conçues avant tout pour être conduites par leurs propriétaires et non par des chauffeurs en uniforme.

Si les boîtes de vitesses « traditionnelles » qui équipent encore les Buick des millésimes 1946 et 47 ne nécessitent donc pas de posséder des bras de camionneurs pour en manoeuvrer le volant ainsi que changer les vitesses, la nouvelle boîte de vitesses automatique Dynaflow qui sera montée sur les modèles de la série Roadmaster à partir de 1948 fera encore mieux dans ce domaine (même si, surtout dans sa version originelle, elle ne se caractérisera pas vraiment par une grande nervosité mais, au contraire, plutôt par sa placidité), ce qui explique pourquoi certains, surtout au sein des (rares) Européens qui auront le « privilège » d’en prendre le volant, lui reprocheront, en tout cas, en conduite urbaine ou semi-urbaine, de faire preuve d’une placidité digne de celle d’une tortue).

Parmi les anecdotes sur les premières Buick d’après-guerre, l’une des plus surprenantes et « cocasse » est sans doute celle qui concerne les butoirs de pare-chocs que l’on retrouve normalement sur les modèles de ce millésime. L’usine en charge de la fabrication de cet accessoire étant frappée par une grève qui se prolongera jusqu’en mars 1946, ceci obligera alors le constructeur à recourir, un peu dans l’urgence, à un expédient assez inattendu… mais guère convaincant pour autant afin de les remplacer. A savoir des butoirs de protection réalisés en bois, auxquels le constructeur n’avait pas jugé utile et donc pris la peine de donner une apparence similaire à celle des butoirs d’origine. C’est pourquoi il n’est guère étonnant, à la fois, que le résultat ne soit guère réussi (pour ne pas dire assez hideux) sur le plan esthétique mais aussi que, dès que la possibilité leur en sera donnée, la quasi-totalité des propriétaires ayant fait l’acquisition des voitures concernées s’empresseront de retourner chez leurs concessionnaires afin de les faire équiper des butoirs chromés d’origine dont celles-ci auraient dû être équipées à leur sortie d’usine.

BUICK 1946 – 48 - Mieux qu'une Cadillac ?
BUICK SERIE 50 SUPER 1946

Au vu de l’importance de la demande en voitures neuves, des délais d’attente qui (même avec des chaînes d’assemblage tournant à plein régime chez tous les constructeurs) restent assez longs, il n’est guère étonnant qu’en plus de prolonger la carrière de leurs modèles d’avant-guerre, ces derniers ne leur apportent aucunes modifications majeures. A l’image des modèles de nombreux autres constructeurs, parvenir à différencier les Buick des années-modèles 1946, 47 et 48 revient quasiment à jouer au jeu des sept erreurs. Il n’y a guère, en effet, que le dessin de certaines pièces d’accastillage comme la calandre ainsi que la mascotte placée à l’extrémité du capot ainsi que le logo de la marque (qui prend, généralement, place entre la mascotte et la calandre ou directement sur celle-ci, son emplacement comme son dessin peuvent changer à chaque millésime).

BUICK 1946 – 48 - Mieux qu'une Cadillac ?
BUICK SERIE 50 SUPER SEDAN 1948

Hormis cela, la gamme reste identique, durant ces trois millésimes, qu’il s’agisse des différentes séries, les carrosseries proposées au sein de ces dernières ainsi que les motorisations. Si les séries Super et Roadmaster sont disponibles avec la carrosserie station-wagon, Buick est alors l’un des rares constructeurs américains spécialisés dans les voitures de haut de gamme à proposer celle-ci à son catalogue, du fait d’une image renvoyant encore beaucoup à celle des véhicules utilitaires.

Il en est cependant tout autrement concernant les station-wagons Buick des séries 50 et 70, ce dernier, sortant des ateliers du carrossier Iona, étant ainsi le plus cher de la gamme, étant vendu plus de 3 200 dollars. Il sera aussi le plus rare des modèles du catalogue : durant l’année-modèle 1947, il n’en sera ainsi produit que 427 exemplaires (dont 127 seront vendus à l’étranger). Après avoir « jouées les prolongations » durant trois ans, les anciennes Buick cèdent la place à de nouveaux modèles qui inaugurent le nouveau style « ponton intégral ». Si les nouvelles Buick présentent désormais une silhouette plus moderne (et aussi plus massive), elles conservent, en revanche, une face avant au dessin fort similaire à celui de ses devancières (hormis une calandre plus large) et cela, jusqu’à la présentation des Buick de l’année-modèle 1953. Une autre raison qui explique qu’elles restent parmi les américaines les plus emblématiques des années 40 ainsi que du début des années 50.

Maxime DUBREUIL

Photos Wikimedia & couverture Barret-Jackson Auction Company

D’autres américaines https://www.retropassionautomobiles.fr/2023/05/studebaker-lark-1959-lalouette-americaine/

En vidéo https://www.youtube.com/watch?v=i8xt8_hRZ70&ab_channel=GatewayClassicCars

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