PACKARD – L’ascension et la chute du cormoran (partie I).
L’histoire de la fondation de la firme automobile Packard est, d’une certaine façon, assez similaire à celle de Lamborghini. C’est, en effet, parce que Ferrucio Lamborghini, industriel jusqu’ici spécialisé dans les machines agricoles et grand amateur de voitures sportives, avait été éconduit par Enzo Ferrari, qui refusait d’écouter ses doléances sur le manque de fiabilité des modèles de la marque au cheval cabré, qu’il décida de devenir constructeur de voitures de sport, avec, bien évidemment, pour objectif de faire encore mieux que les Ferrari. De même, c’est parce que James Ward Packard était insatisfait de sa voiture, une Winton, acquise en 1889, et que son constructeur, Alexander Winton, vantait pourtant comme la meilleure voiture du monde (à l’image de ce que fera plus tard Henry Royce avec ses Rolls-Royce), qu’il se décida finalement à construire sa propre voiture, après que le constructeur ait refusé de prendre en compte ses réclamations. Quand James W. Packard décide de se lancer dans l’aventure automobile, il est aidé dans sa tâche par deux anciens mécaniciens de chez Winton.
La première automobile Packard est terminée en novembre 1899 dans la boutique de fabrication de lampes à incandescence et de transformateurs électriques que lui et son frère William possèdent à Warren, dans l’Ohio. Si quatre autres exemplaires de cette première Packard (qui sera baptisée, en toute logique, modèle A) seront construits au cours de l’année 1901, de nombreuses innovations verront le jour. James Packard faisant preuve d’un esprit hautement perfectionniste. Ce qui sera également le cas pour le second modèle de la marque, le modèle B, construit à 40 exemplaires durant l’année 1900.
Parmi les caractéristiques les plus remarquables des Packard, celles-ci possédaient déjà, entre autres innovations, une avance automatique à l’allumage et une boîte équipée d’une grille de vitesses en H, qui se généraliseront chez tous les autres constructeurs automobiles quelques années plus tard. En septembre 1900, l’entreprise des frères Packard est réorganisée pour la production automobile et abandonne son nom originel de New York and Ohio Company pour celui de Ohio Automobile Company. C’est aussi à cette époque, en 1901, que naît le célèbre slogan de la marque, que celle-ci conservera jusqu’à la fin de ses activités : « Ask the man owns one » (« Demander à celui qui en possède une »).
A cette époque, la marque peut déjà se prévaloir d’une excellente réputation. Parmi ses clients les plus célèbres, on compte ainsi le célèbre magnat du pétrole William Rockefeller, qui, au Salon de New York, en novembre 1900, délaisse les Winton qu’il utilisait jusqu’ici d’habitude pour s’offrir deux Packard Model F. Le milliardaire deviendra par la suite l’un des clients les fidèles de la marque.
Si la marque fondée par James Ward Packard n’a donc pas mis longtemps à se faire un nom dans le paysage automobile du début du XXème siècle, ce n’est toutefois qu’en octobre 1902 qu’elle prend officiellement le nom de son fondateur et devient ainsi la Packard Motor Car Company. A cette occasion, 2500 actions sont émises afin d’augmenter le capital. Toutes sont acquises par Henry Joy, un gros businessman de Detroit, et ses associés. C’est aussi à Detroit, la future capitale de l’automobile américaine, que la société s’installe en 1903, dans une nouvelle usine conçue par l’architecte Albert Kahn. C’est là que seront fabriquées toutes les Packard jusqu’en 1956.
C’est le Model L, présenté en septembre 1903, qui sera le premier à recevoir le nouveau radiateur « à épaules » qui va devenir, dès lors, une caractéristique commune à tous les modèles de la marque et permettra au public de reconnaître au premier coup d’oeil une Packard. La gamme proposée au catalogue s’est rapidement diversifiée, allant du Model F à moteur monocylindre au Model K à quatre cylindres (ce qui correspond alors à une très grosse voiture). La première Packard à moteur six cylindres est présentée en avril 1911. Il s’agit de l’une des premières voitures américaines équipées d’un démarreur et de phares électriques.
C’est à Packard que reviendra l’honneur de commercialiser, en 1915, la première voiture du monde équipée d’un moteur douze cylindres, la Twin-Six, préfigurant ainsi une mode qui aura cours dans les années 30 chez la plupart des constructeurs de voitures de luxe, celle des moteurs multicylindres. La Packard Twin-Six restera au catalogue jusqu’en 1923, en ayant été produite à plus de 35 000 exemplaires.
Ayant, entre-temps, pris le contrôle de la firme, Henry Joy est toutefois obligé d’en quitter la présidence en 1917, se retrouvant en désaccord complet avec ses actionnaires. Joy nourrit en effet des projets expansionnistes et vaut fusionner Packard avec une ou plusieurs autres firmes automobiles, pour former ainsi un nouveau grand groupe automobile, destiné à concurrencer General Motors. Mais les actionnaires refusent, ces derniers ne pensant pas qu’une fusion puisse apporter quoi que ce soit de plus à Packard. Cette même année 1917, les Etats-Unis entrent en guère contre l’Allemagne. Comme la plupart des autres constructeurs américains, Packard participe lui aussi à l’effort de guerre, en produisant les moteurs pour les avions Liberty (qui, de l’avis d’Orville Wright, sera le meilleur avion jamais construit à cette époque).
A partir de 1923, les Packard ne sont plus répertoriées par année mais en tant que série. Ainsi, les modèles du millésime 1923 seront répertoriés, au catalogue comme en interne, en tant que Packard Forst Series. L’année suivante, les voitures de la marque recevront des freins sur les quatre roues. Si les chiffres atteints par la production restent globalement assez faibles, avec seulement un peu plus de 32 000 voitures construites en 1925, cela représente toutefois le double de l’année précédente. Beaucoup, à cette époque, trouveront le dessin du radiateur des Packard fort réussi. A tel point que certains constructeurs ne se gênent pas pour le copier, ainsi que le dessin des enjoliveurs de roues. Leur dessin étant toutefois protégé par un brevet, le département juridique de Packard porte bientôt plainte contre ceux de ses concurrents qui ont commis cette infraction, comme Buick ou Dagmar. Depuis le lancement de la Twin-Six, Packard figure parmi les principaux constructeurs de voitures de luxe aux Etats-Unis. Les autres principaux représentants étant Cadillac, Peerless, Pierce Arrow, Lincoln, Marmon et Stutz. Afin d’affirmer encore plus son caractère élitiste, Packard lance en 1926 sa gamme spéciale « original Creations by Master Designers », une ligne de voitures équipées de carrosseries personnalisées créées par les plus grands carrossiers. A partir de 1928, pour honorer la mémoire de son fondateur, James Ward Packard, mort l’année précédente, les voitures de la marque seront surmontées d’une mascotte, emblème de la famille Packard.
Si, à la fin des années 1920, toutes les Packard sont motorisées par des moteurs huit cylindres, les dirigeants de la marque, toujours dans le but de se maintenir dans le peloton de tête des marques de prestige américaines, songent à lancer un nouveau moteur V12. Les premiers essais de celui-ci commencent dès cette année-là. Le PDG de Packard de l’époque, Alvan Macauley (qui prit la succession de Joy et présida la marque jusqu’en 1939, avant d’en devenir le président du conseil d’administration, poste qu’il occupa jusqu’en 1948) avait, au départ, le projet d’en faire une voiture à traction avant et, dans ce but, fait appel à Cornelius Van Ranst (l’un des « pères », avec Harry Miller et Leon Duray, de la Cord L-29). Le plan initial prévoyant que le modèle V12 s’oppose aux Buick et coûte moins de 2 000 dollars (alors que les Packard huit cylindres valent alors entre 2 500 et 6 000 dollars). La mise au point de la transmission va toutefois poser de tels problèmes que celle-ci est finalement abandonnée, la direction ne retenant alors des travaux de Van Ranst que les moteurs V12. Le modèle qui en sera équipé, la Packard Ninth Series Twin Six, est présenté au Salon de l’automobile de New York en janvier 1932. L’appellation Twin six ne sera toutefois conservée que pour ce premier millésime de production, comme une réminiscence nostalgique des années 1910, époque du lancement de la première Packard V12. Le nouveau V12 Packard affiche une cylindrée de 7 290 cc et une puissance de 160 chevaux. Bien qu’il soit encore équipé de soupapes latérales (comme c’est d’ailleurs encore le cas de plus des trois quarts des constructeurs américains, qu’is construisent des modèles de prestige ou des voitures populaires), ce nouveau moteur s’avère particulièrement sophistiqué, avec des soupapes disposées tout en haut des cylindres (en position presque horizontale), des pistons en alliage léger et des poussoirs hydrauliques, ce qui lui assure non seulement un très bon rendement mais aussi un silence de fonctionnement exceptionnel. Il bénéficiera également, à partir de 1934, de culasses en aluminium et, au fil des années, d’une hausse régulière du taux de compression, ce qui permettra à ces lourdes voitures d’atteindre des vitesses dignes d’une voiture de sport. Si les catalogues de l’époque donnent une vitesse de 136 km/h, une berline V12 réussira pourtant à atteindre plus de 160 km/h.
C’ est aussi en 1932 que la marque adopte comme emblème le cormoran (parfois aussi désigné comme un pélican), que l’on retrouvera sur les armoiries figurant le logo de la marque ainsi que comme mascotte sur le radiateur de tous les modèles de la marque jusqu’à la fin des années 1940.
D’un strict point de vue commercial, le lancement d’un tel modèle de grand luxe relève de la gageure. Le krach boursier qui s’est produit en octobre 1929 a provoqué un véritable séisme au sein de la société américaine et une tempête sans précédent qui n’en finit pas de ravager son économie. Aucun constructeur n’y échappe. Comme la plupart des firmes indépendantes, Packard figure d’ailleurs parmi les plus touchées. D’un peu plus de 28 000 exemplaires en 1930, la production va connaître une chute spectaculaire, pour atteindre à peine la barre des 8 000 exemplaires en 1932, année du lancement de la nouvelle V12.
Pour tenter de contrer les effets de la dépression, Packard présente tout d’abord, en janvier 1932, en même temps que cette dernière, la série Light Eight. Equipée d’un moteur huit cylindres de 110 chevaux, elle peut atteindre une vitesse de 115 km/h. Seules quatre carrosseries sont toutefois proposées au catalogue, alors que le modèle haut de gamme, la Packard Twelve, en compte pas moins de vingt-et-une. La Light Eight ne rencontrera toutefois pas le succès escompté, malgré des prix abordables allant de 1 750 à 1 795 dollars. (ce qui peut paraître cher quand on sait qu’un modèle populaire comme une Chevrolet est vendue entre 450 et 500 dollars pour les modèles les moins chers, mais apparaît malgré tout assez bon marché quand on sait que la plus chère de toutes les Packard, la V12 en carrosserie landaulet à 7 places, coûte pas moins de 8 000 dollars). Bien qu’ayant été construits à 6 750 exemplaires (ce qui représente tout de même environ les 4/5ème des ventes de ce millésime), ces chiffres se révèlent pourtant inférieurs aux prévisions. Mais il faut cependant ajouter que l’autre raison de l’arrêt de la série Light Eight est qu’elle coûte trop cher à fabriquer.
Si, en 1933, la production remonte légèrement (9 760 voitures produites), elle reste à un niveau bien inférieur à ce qu’elle était avant la crise. Si l’année 1934 sera marquée, dans l’histoire de l’automobile américaine, par la révolution que représente, sur le plan du style, la Chrysler Airflow, les autres constructeurs, eux, en revanche, font preuve de beaucoup plus de réserve. Ainsi, il n’y a guère que les ailes munies de bavolets et qui descendent presque jusqu’aux pare-chocs qui différencient les Packard du millésime 1934 de celles des années précédentes. Comme pour la grande majorité des constructeurs indépendants, le renouvellement des lignes des modèles se fait à un rythme moins fréquent que celui des marques des grands groupes automobiles comme General Motors, Ford et Chrysler. De plus, la majeure partie de la clientèle de la marque est assez conservatrice et continue à plébisciter le style fort classique des Packard du début des années 30. Face à la nouvelle orientation qu’on adopté ses concurrents (Cadillac, Lincoln ou d’autres) en matière de style, Packard ne peut toutefois rester indifférent et doit lui aussi faire évoluer ses modèles pour leur permettre de rester « dans le coup ».
Si l’évolution des modèles du millésime 1935 en matière de style est significative par rapport à celui des Packard de l’année précédente, avec leurs nouvelles calandres et leurs pare-brises inclinés, leurs ailes bombées et leurs phares profilés, les nouveaux modèles n’en conservent pas moins une allure fort classique. Même pour quelqu’un qui ne s’intéresse guère à l’automobile, il n’y a guère de risque de la confondre avec une Lincoln Zephyr (qui incarne la nouvelle tendance en matière de ligne aérodynamique pour l’automobile américaine, manifestement inspirée par la Chrysler Airflow mais bien plus élégante que cette dernière). Même si, aujourd’hui, beaucoup, parmi les admirateurs de la marque, préfèrent les modèles de la lignée précédente, on ne peut néanmoins nier aux Packard de la seconde moitié des années 30 des lignes d’une grande élégance.
Tout comme les Packard marquèrent l’histoire de l’automobile des années 1930, elles séduisirent aussi certains des grands de ce monde de l’époque. Parmi eux figurent notamment le futur président des Etats Unis, Franklin Roosevelt, alors gouverneur de l’Etat de New York et candidat du Parti Démocrate à l’élection présidentielle de 1932. Pour sa compagne électorale qu’il mena à travers le territoire américaine, ce fut à bord d’un torpédo Packard qu’il partit à la rencontre de ses électeurs. Ce qui permettra à la marque de faire son entrée dans les garages de la Maison Blanche lorsque Roosevelt deviendra le nouveau président, en mars 1933. (Même si la marque finira par être détrônée par Lincoln à l’aube de la décennie suivante). Une autre Packard, à la même époque, marquera l’histoire, celle de la famille royale de Belgique. Au début de l’année 1935, le roi des Belges, Leopold III, offrit à son épouse, la reine Astrid, un cabriolet Packard identique à celui que le couple royal avait admiré lors de sa visite au Salon de l’Automobile en décembre de l’année précédente. C’est à bord de cette voiture que la reine Astrid trouvera la mort dans un tragique accident de voiture à Küssnacht, en suisse, sur les bords du Lac des Quatre Cantons, le 29 août 1935, à l’âge de 30 ans à peine. Rongé par le chagrin, le roi demanda à ce que la voiture soit immergée à l’endroit le plus profond du lac.
L’année 1935 est également une grande date dans l’histoire de la marque Packard avec le lancement de la Série One-Twenty Eight. Malgré une première tentative infructueuse de diversifier sa gamme vers le bas, avec la Série Light Eight en 1932, et en voyant la plupart des autres constructeurs indépendants (surtout ceux spécialisés dans les voitures de luxe) mettent la clé sous la porte les uns après les autres (comme Peerlees en 1931 ou Marmon en 1933), les dirigeants de Packard ont bien conscience que, étant donné le contexte économique toujours aussi morose et la crise qui s’éternise, la marque ne peut faire autrement que de cesser de se cantonner exclusivement sur le marché haut de gamme et qu’il faut un modèle capable d’aller concurrencer les voitures de gamme intermédiaire comme les Buick d’entrée de gamme ou les Chrysler de gamme similaire) et donc d’attirer chez ses concessionnaires un nouveau genre de clientèle, qui n’aurait jamais pensé (ou qui n’avait pas vraiment les moyens), jusqu’ici, de faire l’acquisition d’une Packard. Le moteur de cette nouvelle Packard d’entrée de gamme développe une puissance de 110 chevaux (contre 130 et 150 pour les autres modèles de la gamme huit cylindres, les Eight et Super Eight et 180 pour la Twelve) et elle est construite sur un châssis d’un empattement d’une longueur de 3,04 m (contre 3,22 m, 3,40 m, 3,55 m et 3,66 mètres pour les autres Séries proposées au catalogue, suivant les carrosseries). Cette nouvelle tentative d’offrir une Packard « bon marché » sera, cette fois, la bonne pour Packard. La One-Twenty sera en effet un véritable succès puisqu’il s’en vendra 25 000 exemplaires durant sa première année de production, alors qu’il ne se vendra qu’environ 7 000 Packard des autres séries réunies. De plus, cette série populaire bénéficie d’innovations techniques comme les freins hydrauliques ou les suspensions avant à roues indépendantes, auxquelles les autres Packard n’auront pas droit avant plusieurs années.
A l’occasion de la présentation des modèles du millésime 1936, ceux-ci passeront directement de la 12ème à la 14ème série. Par superstition, la direction de la marque décidera en effet de faire l’impasse sur la 13ème série pour ne pas s’attirer de mauvaise fortune. Suivant en cela la même politique que celle pratiquée par la plupart des autres constructeurs américains et qui vient, d’une certaine façon, contredire une croyance (pourtant encore tenace) affirmant que ceux-ci modifient les lignes de leurs modèles chaque année, les Packard de l’année-modèle 1936 conservent des carrosseries pratiquement identiques à celles du millésime précédent, les changements se limitant au dessin de la grille de calandre, du capot et des ailes, sensiblement remaniées, ainsi que des détails d’aménagement intérieur. A l’époque, les marques américaines ne renouvellent réellement leurs modèles que tous les deux ou trois ans. Chez les constructeurs indépendants, par contre, cela se fait souvent à un rythme moins régulier, ceux-ci n’ayant évidemment pas les mêmes moyens que leurs concurrents. Ce qui explique que les Packard conserveront les mêmes lignes entre 1935 et 1939.
Comme il a toutefois été dit, la clientèle de la marque est plutôt conservatrice et se montre plutôt réfractaire aux changements de style trop radicaux ou trop fréquents, d’autant que le style adopté par Packard en 1935 continuera jusqu’à la fin d’être plébiscité par ses clients. Ainsi, de plus de 80 000 exemplaires en 1936, elle franchira, l’année suivante, la barre (hautement symbolique) des 100 000 unités (109 518 voitures produites, très exactement), ce qui permet à Packard de se hisser à la neuvième place des constructeurs américains. (La marque occupait la 15ème place au début de la décennie).
Poursuivant sa politique d’élargissement de sa gamme vers le bas, Packard décide de s’attaquer directement aux marques américaines les plus populaires et de concurrencer les modèles « haut de gamme » de Chevrolet, Ford et Chrysler, en lançant la Série 115 Six. Il s’agit d’un événement marquant pour la marque, non seulement parce qu’il s’agit du premier modèle où toutes les versions sont affichées sous la barre des 1 000 dollars (A l’exception du station wagon, qui ne fera son apparition au catalogue que plus tard au cours du millésime et qui était vendu 1 250 dollars), mais aussi parce qu’il s’agit de la première Packard équipée d’un moteur six cylindres depuis 1923. Ce nouveau modèle de base reprend toutefois une grande partie des composants du huit cylindres de la Série One-Twenty. D’une cylindrée de 3,88 litres, il développe une puissance de 100 chevaux. Par rapport aux modèles huit cylindres, la 115 Six se distingue extérieurement par un capot et des ailes avant plus courtes et des ouïes de capot peintes de la couleur de la carrosserie (alors qu’ils sont chromés sur les autres modèles de la gamme) et la présentation intérieure est également moins riche. Celle qui est maintenant la moins chère des Packard obtient un assez beau succès, puisqu’il en sera produit un peu plus de 30 000 exemplaires durant sa première année de production.
L’apparition de ce nouveau modèle « d’attaque » ne pénalisera toutefois pas les ventes de celle qui occupait jusque-là ce rôle, la One-Twenty. Cette dernière continue en effet à bien se vendre (plus de 50 000 exemplaires produits durant le millésime 1937). L’autre modèle huit cylindres de la gamme, la Super Eight est, elle, enfin équipée de roues avant indépendantes pour sa suspension et de freins hydrauliques. La Série Twelve à moteur douze cylindres profitant, elle aussi, des mêmes innovations. En ayant dépassé les 100 000 voitures sorties de chaîne, la marque réalise là son meilleur score de toute la décennie.
En 1938, une récession économique importante frappe le pays, ce qui explique que Packard, comme presque tous les autres constructeurs américains, enregistrent une baisse importante de ses ventes, qui atteignent à peine la barre des 50 000 exemplaires, soit deux fois moins qu’en 1937. Un trait esthétique qui permet de reconnaître les modèles de ce millésime est la baguette centrale qui part de l’extrémité de la calandre, qui court le long du capot, sépare le pare-brise en deux parties et remonte jusqu’au bord du toit. La série de base Six bénéficiant, elle, d’une carrosserie construite entièrement en acier. Un procédé de fabrication plus moderne mais plus chère, ce qui explique qu’il ne soit proposé que cinq types de carrosseries au catalogue, contre huit l’année précédente. Le modèle huit cylindres la moins chère de la gamme, la One Twenty, est rebaptisée, tout simplement, Série Eight. Comme pour cette dernière, elle voit son empattement augmenté de 18 cm et passé à 3,22 m pour les versions normales et 3,75 mètres pour les versions longues (contre 3,09 m pour la Six).
Pour l’année-modèle 1939, la Série Eight retrouve son appellation originelle One Twenty. Comme sur la six, le levier de vitesses est maintenant monté sur la colonne de direction. Absent sur ces deux modèles durant le millésime précédent, le station wagon fait ici sa réapparition au catalogue. La plus grande des Packard huit cylindres, la Super Eight, voit, elle, sa gamme être réduite de manière drastique. Des quinze carrosseries qui étaient proposées en 1938, elles ne sont plus que six en 1939 (coupé, cabriolet, berline, berline décapotable sur le châssis avec l’empattement de 3,22 m ainsi qu’une berline et une limousine sur celui de 3,75 mètres). Le moteur huit cylindres de 5,24 litres (développant 130 chevaux) en est à sa dernière année de production. C’est également le cas pour le haut de gamme du catalogue Packard, la Série Twelve. S’il en avait été produit près de 2 500 exemplaires durant le millésime 1938, pour sa dernière année, moins de 500 exemplaires en seront construits (446 exactement). Quatorze types de carrosseries sont proposées (huit sur un châssis de 3,40 m et six autres sur un empattement de 3,52 mètres), avec des prix allant de 4 155 à 8 355 dollars. (Par comparaison, la moins chère des Packard Six avec la carrosserie Business Coupe à 2 places ne coûte que 888 dollars). Il est vrai qu’en cette fin des années 30, les voitures à moteurs « multicylindres » sont désormais passées de mode (Cadillac ayant déjà supprimée son modèle à moteur V12 en 1937 et celui à moteur V16 disparaissant à son tour en 1940. Après la guerre, seul Lincoln continuera à produire sa Continental à moteur 12 cylindres, jusqu’en 1948). Pendant le conflit, les usines Packard continueront à produire des moteurs V12, mais uniquement pour l’aviation et la marine.
Maxime DUBREUIL
Photos WIKIMEDIA
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