RENAULT 21 TURBO – La chasse aux allemandes.
Avec le turbo, la marque au losange avait très vite compris que tel le druide Panoramix dans les albums des aventures d’Astérix le Gaulois, elle, elle avait véritablement trouvé le secret de la potion magique ! Comme beaucoup d’autres constructeurs l’avaient fait avant elle lors de la création de solutions techniques inédites, c’est à travers l’univers de la compétition que cette solution technique sera mise à l’épreuve et parachèvera sa mise au point. Même si cela se fera, parfois et surtout aux débuts, au prix de plusieurs échecs et autres mésaventures (parfois assez « rocambolesques »).
S’agissant de certains des modèles Renault des années 70 et 80, l’emploi de l’expression « potion magique » n’est pas exagéré ni usurpé, car lorsque l’on regarde, ainsi, la berline R18, surtout dans ses versions de base, celle-ci symbolisait sans doute déjà « de son vivant » et quasiment jusqu’à la caricature la ringardise automobile. A tel point qu’elle aurait pu disputer à la première série de la Peugeot 305 le titre d’ »Archétype de la voiture de l’instituteur ou du clerc de notaire de province », c’est tout dire ! (Et il est sans soute inutile d’ajouter que cela ne s’est pas vraiment arrangé avec le temps, une fois celles-ci mises à la retraite, bien au contraire !).
Même si cela ne les a (nullement) empêchées, l’une comme l’autre, de trouver leur public, leurs constructeurs avaient toutefois conscience, dès le départ, qu’il leur serait sans doute utile (voire indispensable) d’avoir à leur catalogue une version « inédite » de ces dernières. Lesquelles endosseraient alors le rôle de « porte-drapeau » ou de « vaisseau amiral » de la gamme et, en plus de donner un coup de tonus aux chiffres de vente de ces (trop) ternes berlines « franchouillardes », permettraient aussi d’aller quelque peu « provoquer » les berlines germaniques et la domination insolente de ces dernières. Celles-ci ayant fait des autoroutes ainsi que des routes allemandes leur chasse gardée (il est vrai que l’absence de limitations de vitesse précises, en tout cas sur les premières, y a sans doute beaucoup aidé).
Les trois grands constructeurs français (Citroën, Peugeot et Renault) entendaient donc bien leur montrer qu’eux aussi, même si, en dehors, des circuits et des pistes de rallye, ils avaient la réputation de ne pas avoir le sport et la vitesse dans le sang, pouvaient aussi « lâcher les chevaux » lorsque l’occasion se présentait. Les deux crises pétrolières ainsi que la récession économique qui ont ébranlé l’économie occidentale dans les années 70 n’ayant pas découragé le trio « bleu-blanc-rouge » de transformer leurs braves « berlines à papa » presque en « maxi-bombes ». A l’image des GTI, ces berlines sportives présentaient le double (et donc grand) avantage de proposer deux voitures en une : celles-ci permettant, en effet, aussi bien, d’aller à son travail tous les matins que de disputer des spéciales de rallyes le week-end.
Les premiers trophées récoltés en compétition achèveront de convaincre les dirigeants de la Régie du bien-fondé et, même, du potentiel du turbo. Tant et si bien que dès la fin des années 70, celui-ci se retrouvera bientôt sur presque tous les modèles de série de la marque, faisant le bonheur des nombreux « pilotes du dimanche » aux quatre coins de l’Hexagone ! Pour en revenir au cas de la R18, nul doute qu’un grand nombre des acheteurs qui se rendaient chez leurs concessionnaires pour passer commande d’une brave TL d’entrée de gamme se mettaient à rêver devant la superbe Turbo « bleu de France » qui trônaient en bonne place (sur une estrade ou, parfois même, un plateau tournant) au sein du show-room.
L’acheteur en question se consolant, une fois reparti de chez le vendeur Renault avec sa brave TL flambant neuve, en se disant que cette dernière et la Turbo qu’il n’aura (malheureusement pour lui) jamais les moyens de s’offrir (en tout cas neuve) partageaient, néanmoins, de nombreux « gênes » en commun. C’était d’ailleurs la même chose aux Etats-Unis dans les années 60, où l’acheteur d’une Mustang qui s’extasiait devant une superbe Shelby, mais n’avait guère les moyens que d’acquérir un coupé mû par le six cylindres d’entrée de gamme (ou le plus petit des V8 dans le meilleur des cas). Une autre signification ou application, dans l’univers automobile, de la célèbre expression « vendre du rêve » ! Lorsqu’en 1986, la R18 peut faire valoir ses droits à la retraite et laisse alors sa place à la nouvelle Renault 21. « Nouvelle » n’est pas une expression employée à la légère, car si, techniquement parlant, la R18 n’était, au final, rien d’autre qu’une R12 remise au goût du jour, pour la R21, en revanche, Renault est reparti, sur bien des points, d’une feuille blanche.
Même si, sur un plan strictement commercial, la version Turbo de la R18 était loin d’avoir fait exploser les scores de vente (tel n’était d’ailleurs pas l’objectif qui lui était assigné, mais bien de faire en sorte de braquer les projecteurs sur l’ensemble de la gamme R21, le battage médiatique sur son look ainsi que ses performances rejaillissant, en effet, sur ses « soeurs » plus « plébéiennes »). Etant donné que cette dernière a plutôt bien réussi dans cette mission, il est donc tout à fait logique d’inclure une version similaire au sein de la gamme de la R21. Ce qui sera chose faite dès le début de l’été 1987, avec la présentation de la Renault 21 Turbo.
Ayant sans doute, eux aussi, conscience de la nécessité de démontrer le savoir-faire français en matière de berlines familiales à hautes performances et ayant également pris conscience du fabuleux gâteau que représentait ce marché (et étant donc bien déterminés à en croquer une grosse part), les dirigeants de PSA, de leur côté, fourbissent, eux aussi, leurs armes. Sous la forme de la BX GTI chez Citroën et de la 405 Mi16 chez Peugeot, lesquelles (coïncidence ou pas ?) seront présentées quasiment à la même époque que la R21 Turbo.
Un autre point qui n’est probablement qu’une coïncidence, mais qui n’en est pas moins quelque peu « troublante » est que toutes les trois afficheront des puissances assez similaires (bien que leur système d’alimentation soit cependant différent, les modèles du groupe PSA ayant, en effet, déjà abandonné le système de la suralimentation pour celui des culasses multisoupapes). Pour un peu, l’on en viendrait, tout bonnement, à croire que les trois constructeurs se sont, en quelque sorte, « entendus », ou, en tout cas, espionnés les uns les autres, tellement ceci, ainsi que le timing, ne manque pas d’interloquer !
En tout état de cause, s’agissant de la version suralimentée de la R21, cette dernière n’a pas à rougir face à ses concurrentes teutonnes (pour ne citer que ces dernières). Qu’il s’agisse d’une BMW M3, d’une Ford Sierra RS Cosworth ou encore d’une Mercedes 190 2.3-16, la berline au losange peut sans peine leur tenir tête. Si la puissance annoncée de 175 chevaux apparaîtra, malgré tout, un peu « juste » aux yeux d’une partie de la clientèle, il faut souligner que la puissance développée par le turbo (un Garrett T3, soufflant à une pression de 0,9 bar) avait été volontairement limitée afin de respecter une certaine « hiérarchie » de gamme et de ne pas faire trop d’ombre à la version similaire de la R25 V6 l’écart avec la R21 Turbo étant, en effet, assez faible, puisque le PRV équipé d’un turbo développait, quant à lui, 182 chevaux). Les ingénieurs du losange ne s’étant, toutefois, pas limités à greffer un turbo sur le bloc J7R (dérivé de celui monté sur les versions RX et TXE contemporaines, lequel délivrait 120 ch dans sa version initiale, preuve que l’ajout de la suralimentation a eu un effet bénéfique concret sur la puissance), mais se sont aussi occupés du bloc-moteur, avec (entre autres) des bielles et pistons spécifiques, des coussinets renforcés, un carter d’huile cloisonné ainsi qu’une pompe à huile au débit majoré, des soupapes d’échappement refroidies au sodium. Histoire de permettre à cette mécanique (qui, à l’origine, il faut le rappeler, n’avait jamais été conçue pour faire fumer le bitume) d’encaisser sans mal le supplément de cavalerie délivré par le turbo.
Question look, si l’on est en droit aujourd’hui, de trouver que la silhouette tricorps (ultra-)classique de la Renault 21 (quelque soit sa version, qu’il s’agisse d’une TL ou SD d’entrée de gamme ou de la Turbo) a pris un coup de vieux certain (plus encore à l’heure où le segment des berlines familiales traditionnelles a été marginalisée par l’hégémonie des SUV). Mais il faut rappeler qu’à son époque et au vu de ce qu’était alors le segment dans lequel elle s’inscrivait, en 1986, elle paraissait tout à fait « dans le vent ». En outre, lorsqu’on la compare à sa devancière, il était clair que, sur le plan esthétique aussi, la nouvelle R21 apportait un vent de modernité bienvenu au sein de la gamme du losange.
Elle fait d’ailleurs son entrée en scène à une époque charnière pour la Régie, en ce qui concerne les bouleversements assez nombreux au sein du catalogue (remplacement, en haut de gamme, du tandem R20 / R30 par la R25 ; de la R5 par la Supercinq ; lancement de l’Espace, qui sera le premier monospace français, pour ne citer que les principaux d’entre-eux). Mais aussi pour la politique du constructeur lui-même. Il faut, en effet, rappeler que, bien qu’il avait vu, à l’automne 1984, son mandat à la tête du constructeur renouvelé, l’aveu d’une ardoise d’un montant record (12,5 milliards de francs) coûtera sa place à Bernard Hanon, qui se voit alors remplacé par George Besse. Lequel n’aura, malgré le début de mise en place d’une nouvelle politique destinée à sortir le constructeur de la tempête financière dans lequel il se trouvait plongé, n’aura guère le temps d’imprimer véritablement sa marque. Il sera, en effet, assassiné par le groupe terroriste Action Directe à l’automne 1986. Avec pour conséquence que c’est son successeur, Raymond Lévy, qui concrétisera véritablement cette politique de redressement.
L’un des points clés de celle-ci étant l’accent mis sur la qualité perçue (c’est-à-dire la finition, surtout intérieure) des nouveaux modèles ainsi que leur fiabilité technique. Il est vrai que, sur ces points clés, les voitures françaises accusaient alors un retard assez important face à leurs rivales allemandes. A tel point que certaines « mauvaises langues » (aussi bien dans la presse automobile que le public) disaient que, sur les différents points en question, elles se situaient à peine un cran au-dessus des productions des pays du bloc de l’Est, c’est tout dire ! Outre les futurs modèles qui viendront, par la suite, renouvelé le catalogue Renault (la première de cette « nouvelle ère » étant la R19, présentée en 1988), les autres modèles déjà existants au sein de la gamme bénéficieront, eux aussi, dans leurs nouvelles séries, d’une meilleure finition (que ce soit pour les matériaux employés ainsi que pour leur assemblage).
Même s’il est vrai que tout ne passera pas du noir au blanc en un claquement de doigts et que la marque au losange mettre encore un certain nombre d’années avant de pouvoir véritablement revendiquer que ces modèles (qu’il s’agisse d’une modeste Twingo ou Clio comme d’une « imposante » Safrane) affiche une finition qui n’est absolument plus ) rougir face à leurs concurrentes venues d’outre-Rhin.
Pour en revenir à la Renault 21, lorsque sa version Turbo entre en scène, les amateurs ne sont pas déçus, que ce soit du point de vue des performances comme de la tenue de route, mais aussi en ce qui concerne le « survêtement » (autrement dit : la « tenue de sport ») qu’à enfiler la R21 Turbo pour aller croiser le fer avec les Audi, BMW et Mercedes. L’on n’était, en effet, pas encore entré dans l’ère du « politiquement correct » et (sans doute faut-il voir là une volonté de tourner la page de la morosité engendrer par les deux crises pétrolières et la récession économique des années 70) lorsqu’une voiture bénéficiait d’une large cavalerie sous le capot, elle le faisait clairement savoir. L’on pourrait même dire que la période allant de la seconde moitié des années 70 au milieu des années 90 fut, à certains égards, une sorte de « nouveau mai 68 » ! Les célèbres slogans nés lors de cette période, « Il est interdit d’interdire ! », « Jouissons sans entraves ! », Renault aurait très bien pu les afficher en gros caractères dans ses brochures et affiches publicitaires pour la R21 Turbo (ainsi, d’ailleurs que ses rivales du lion et des chevrons), ainsi, d’ailleurs, que dans les clips publicitaires qui passaient alors à la télévision !
Tous les amateurs se souviennent sans doute du célèbre clip publicitaire diffusé à l’époque montrant une R21 Turbo filant à toute vitesse sur autoroute, poursuivie par plusieurs hélicoptères de la police… allemande. (Etait-ce involontaire de la part des gens du service marketing de Renault ou une manière de bien faire comprendre que pour profiter pleinement de son potentiel, il n’y aurait d’autre choix que d’aller faire du tourisme chez nos voisins teutons ?). A la fin du clip, cernée par les appareils, la voiture se voit contrainte de s’arrêter sur un parking, où les policiers à bord des hélicos, une fois posé le pied à terre, lancent au conducteur : « Bonjour Monsieur ! Dites-moi, elle accélère plutôt gentiment votre voiture ! ». Ce dernier leur répondant alors : « Bien sûr, c’est la nouvelle Renault 21 2 L Turbo ! ». Et l’un des policiers de lancer (en forçant bien sur l’accent allemand) : « Aaah ! Bien zuuur !… ». Une manière, là aussi, de bien insister sur le fait que la berline du losange suralimentée n’avait rien à envier aux berlines sportives « made in Germany ». Le visionnage de ce clip renvoyant un temps que « les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître » (pour reprendre un refrain bien connu), où il n’y avait pas encore une voiture de flics et/ou un radar derrière chaque buisson ou chaque bretelle d’autoroute. Une époque que la jeune génération ne connaît (entre autres) que par le cinéma, mais qu’ils regrettent (ouvertement) de ne pas avoir connu ! Et dont ceux qui l’ont connu ont (tout aussi ouvertement) la nostalgie !
Même quelqu’un qui ne s’intéressait pas du tout à l’automobile ou qui n’aurait jamais entendu parler de la Renault 21 aurait deviner, d’un simple coup d’oeil, la vocation de la version Turbo, tellement cela transparaissait, quel que soit l’angle sous laquelle on la regardait… Et pourtant (pour en rester à l’aspect strictement esthétique) les différences entre une Turbo et les versions « courantes » de la R21 ne sont, finalement, pas si nombreuses. Outre l’aileron, l’on peut aussi citer les bas de caisse, la calandre, les pare-chocs avant et arrière, jantes type « turbine » et poupe au dessin plus anguleux. C’est à peu près tout ! Comme quoi, il n’y a parfois besoin de pas grand-chose pour transformer une brave et simple « berline à papa » en un « avion de chasse sur quatre roues ». Même si certains, tant parmi les journalistes que les clients potentiels ne manqueront toutefois pas de souligner qu’ils auraient, néanmoins, souhaiter pouvoir profiter d’une présentation intérieure plus exclusive, surtout au vu du prix demandé. La R21 2 L Turbo étant, en effet, affichée pas moins de 270 000 F à son lancement, soit deux fois et demie le prix d’une version GTS ! Une manière de rappeler que, chez les constructeurs français comme chez leurs concurrents d’outre-Rhin, l’exclusivité avait toujours un prix (élevé) !
Dans l’habitacle aussi, les différences véritables qui permettent de comprendre, une fois installé derrière le volant, que l’on se trouve à bord d’une version sportive de la brave Renault 21 ne se compte presque que sur les doigts d’une main (la plus flagrante étant l’instrumentation sur fond rouge, que l’on retrouve également, au sein de la gamme Renault contemporaine, sur la Supercinq GT Turbo ainsi que l’Alpine GTA), mais cela suffit amplement (en tout cas, aux yeux de son constructeur) pour bien indiquer (ou, tout du moins, laisser deviner) qu’il y a pas mal de chevaux disponibles sous le pied droit !
En effet, tout aussi élevées que soient ses performances, une Renault 21 Turbo reste aussi (ou surtout ?) une R21 ! (Il faut, en outre, rappeler que l’intérieur d’une BMW M3 E30, pour ne citer que celle-ci, ne versait guère plus dans l’extravagance ou la gaudriole). Pas question de verser dans « l’exubérance décomplexée » de certaines des Mercedes AMG ou BMW Alpina de l’époque (sans même parler des créations les plus extrêmes de certains préparateurs, à l’image de Koenig, qui semblent avoir été conçues après une grosse prise de cannabis, voire même de cocaïne !). Toute aussi puissante et rapide soit-elle, une berline française se devait, néanmoins, de conserver une certaine « retenue », ou, tout du moins, une certaine «classe et distinction » ! La grande majorité des propriétaires de ce genre de modèles étant, en effet, des « bons pères de famille » ou « célibataires dynamiques » (quitte à fleureter avec des « images d’Epinal ») qui, s’ils adoraient se payer des pointes de vitesse sur autoroutes le week-end ou les jours de congé, ne tenaient pas, pour autant, à passer pour des « fous du volant » (au sens péjoratif de l’expression) aux yeux de leur famille comme de leurs voisins ou de leurs collègues de travail. Ce qui voulait dire également dire qu’elle devait conserver une certaine polyvalence d’usage.
Contrairement à ce qui fut le cas sur sa devancière, où la version Trubo fut disponible aussi bien sur la version qu’avec la carrosserie break, la R21 Turbo, de son côté, ne sera toujours proposée qu’en berline quatre portes. La version initiale (baptisée, bien qu’a posteriori, « phase 1 ») n’aura, toutefois, qu’une carrière assez courte, puisqu’elle ne sera produite que durant seulement deux millésimes. En septembre 1989, une nouvelle version (« phase 2 » donc) entre en scène. Les changements esthétiques, aussi bien en ce qui concerne l’accastillage extérieur que la présentation de l’intérieur de l’habitacle, restent toutefois relativement limités. A tel point qu’un « non-initié » pourrait très facilement confondre un exemplaire de la version initiale avec un autre appartenant à la deuxième série. Un véritable amateur du modèle, en revanche, reconnaîtra immédiatement les nouvelles jantes à 5 branches, au dessin plus discret et, donc, beaucoup moins typé « sportives » ; l’aileron arrière redessiné et se détachant plus nettement de la malle de coffre ; les feux arrière, eux aussi, retouchés, légèrement arrondis et joints par un bandeau.
A l’intérieur de la R21 Turbo « phase 2 », le tableau a également bénéficié d’une série de retouches, touchant principalement la « casquette » surmontant les instruments de bord, la console centrale ainsi que les nouvelles commandes de chauffage à potentiomètres remplaçant l’ancien système à tirettes…. Bref, rien de bien révolutionnaire, ni même de très nouveau sous le soleil (même si la R21 « phase 2 », en Turbo comme pour l’ensemble de ses versions, bénéficiera d’un niveau de finition revue à la hausse), en tout cas sur le plan esthétique.
En ce qui concerne l’aspect technique, en revanche, la carrière de cette Turbo « phase 2 » sera marquée par le lancement, cette même année 1989, de la version Quadra. En cette fin des années 80, la transmission à quatre roues motrices (permanente ou non) était alors à la mode chez de nombreux constructeurs européens (Audi ayant prouvé, avec son coupé Quattro et les nombreuses victoires engrangées par celui-ci en rallyes, que l’utilité de celle-ci ne se limitait pas qu’aux véhicules tout-terrains et pour aller crapahuter hors des routes bitumées) et Renault n’y a pas échappé et met donc au point sa propre transmission intégrale, baptisée Quadra (que l’on retrouvera même sur la Renault Espace). La direction de la firme au losange décidant également d’en faire profiter la R21, d’abord sur la version Nevada (l’appellation de la version break) en 1988 et dès l’année suivante sur la berline Turbo.
Si le système Quadra permet d’optimiser la tenue de route, en particulier sur les routes au revêtement dégradé ainsi que par temps de pluie ou sur la neige, il a aussi pour effet de diminuer sensiblement la vivacité de ses réactions (notamment au niveau des reprises) ainsi que d’augmenter quelque peu le poids total de la voiture (130 kg de plus sur la balance, alors que le constructeur avait pourtant conçu un arbre de transmission en fibre de verre afin, justement, de tenter de limiter ce surpoids), tout comme la consommation. Ce qui ne l’empêchera, toutefois, pas d’afficher, elle aussi, de très bonnes performances, avec des accélérations assez similaires à celle de la version à traction avant. La Quadra abattant ainsi le 0 à 100 km/h en 8 sec et le 1 000 mètres départ arrêté en 28,5 secondes, soit des scores quasiment égaux à ceux de la Turbo à deux roues motrices.
Extérieurement, à l’exception des inscriptions « Quadra » apposées sur la carrosserie (notamment sur la malle de coffre), le seul signe distinctif permettant de reconnaître un exemplaire de la version Quadra étant leur sortie d’échappement de forme ovale. Bien que présentée en 1989, les premiers exemplaires de la Turbo Quadra ne seront, toutefois, livrés qu’à l’automne 90. La mise en place des nouvelles normes antipollution instaurées par les instances de l’Union Européenne, entraîneront, toutefois, l’obligation du montage d’un pot catalytique, afin de réduire du mieux possible les émissions en question. Il aura aussi pour effet de diminuer sensiblement la puissance, qui passera, au début de l’automne 1992 (lors du commencement du millésime 93 donc) de 175 à 162 chevaux seulement. Ainsi que de lui faire perdre une partie du caractère « sauvage » qui faisait, pourtant, tout le charme des Renault Turbo des années 80. (Même si la vitesse de pointe, quant à elle, diminuera à peine, passant, simplement, de 228 à 222 km/h).
La version Quadra perdurera au catalogue jusqu’au printemps 1993. (Les derniers exemplaires de la Turbo, vendus sur stock, seront cependant immatriculés comme modèles du millésime 94). Sur un peu plus de 13 780 R21 Turbo (sur un peu plus de deux millions d’exemplaires de Renault 21, toutes versions confondues, ce qui en faisait donc, déjà à son époque, un oiseau rare !), la version Quadra ne connut, malheureusement, sur le plan commercial, qu’une carrière fort confidentielle, puisqu’il n’y eut, en tout et pour tout, que 875 exemplaires produits.
L’entrée en scène de la nouvelle Laguna signant alors la fin de la carrière de la Turbo, en traction comme en quatre roues motrices. Un arrêt marquant aussi la fin d’une époque au sein de la marque au losange, la R21 Turbo disparaissant, en effet, sans laisser de descendance chez sa remplaçante. (Renault avait, certes, demandé au préparateur allemand Hartge, lequel participait à la conception ainsi qu’à la production de l’élitiste Safrane Biturbo, de concevoir une version similaire sur la Laguna. Malgré des performances très prometteuses, le projet sera, toutefois, finalement abandonné, semble-t-il du fait de l’échec commercial cinglant subit par cette version sportive du haut de gamme du losange). Marquant ainsi (à l’image de ce qui se passera chez PSA (lequel ne donnera, en effet, pas de remplaçantes ni à la Citroën BX GTI ni aux Peugeot 405 Mi16 et T16) la fin d’une (belle) époque !
Philippe ROCHE
Photos Wheelsage
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