BALLOT - Une belle, mais trop courte aventure.

BALLOT – Une belle, mais trop courte aventure.

A l’image d’autres constructeurs automobiles créés à la même époque, en France comme à l’étranger, la marque Ballot est une création familiale, puisqu’elle est le fruit non pas d’un seul homme, mais deux frères qui, en 1905, décident d’unir leurs efforts pour se lancer dans l’aventure industrielle. Même si c’est, alors, avant tout dans la production de moteurs marins ainsi de moteurs fixes qu’ils se spécialisent, avant de diversifier, à partir de 1910, leurs activités dans la production de moteurs destinés aux constructeurs automobiles.

Il est vrai qu’à l’époque, bien que la France soit l’un des pays européens comptant alors le plus grand nombre de marques de tous genres, un certain nombre d’entre-elles ne disposent, toutefois, pas des moyens suffisants pour concevoir et, surtout, produire leurs propres mécaniques. C’est pourquoi l’entreprise des frères Ballot va s’employer à leur fournir celles-ci. Comme pour leurs réalisations précédentes, les moteurs automobiles produits par la société des Etablissements Ballot SA se caractérisent par leur qualité de fabrication et, outre des firmes automobiles comme Corre-La-Licorne ou Delaugère et Clayette, plusieurs futurs grands noms de l’automobile française, comme Delage, figureront parmi ses clients.

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Comme un certain nombre d’autres entreprises françaises, le déclenchement de la Première Guerre mondiale, en 1914, permettra à la société de connaître un développement aussi important que rapide. L’effort de guerre nécessitant des moyens fort conséquents, outre ses productions antérieures, la société Ballot va également se diversifier dans la production de groupes électrogènes, mais également dans celles des poids lourds, des moteurs destinés à l’aviation ainsi que dans la construction navale.

Toutefois, une fois le conflit terminé, à l’automne 1918, avec la fin (ou, en tout cas, une forte baisse) des commandes militaires, l’entreprise va devoir faire face à un énorme défi pour sa reconversion. Celle-ci s’étant, entre autres, fait un nom dans les moteurs pour automobiles, le passage à la production entière de celles-ci, en devenant donc constructeur automobile à part entière apparaît donc à Edouard et Maurice Ballot comme une évolution logique.

Comme cela avait été le cas depuis les premiers âges de l’automobile, la compétition reste alors, en ce début des années 1920, le meilleur moyen pour un constructeur automobile d’assurer la promotion de ses modèles. La concurrence est rude sur le marché automobile et cela, quel que soit le marché ciblé.

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Conscient qu’au sein d’un paysage automobile français déjà plutôt saturé, pour qu’un nouveau constructeur parvienne à sortir du rang et donc atteindre sa cible, il faut « marquer un grand coup », les frères Ballot voient, d’emblée, les choses en grand. Les premières voitures portant leur nom recevant ainsi un imposant moteur huit cylindres de 4,8 litres développant 150 chevaux, ce qui (lorsqu’elles sont équipées des carrosseries les plus légères, à l’image de celles conçues pour la compétition) leur permet d’atteindre sans difficulté les 200 km/h.

En outre, avec leur système d’alimentation comportant des chambres de combustion hémisphériques et quatre soupapes par cylindre ainsi que leur distribution à double arbre à cames, elles peuvent également se prévaloir d’une sophistication technique certaine pour l’époque.

Il n’y a d’ailleurs pas que sur les circuits français que les Ballot s’illustreront en course, puisqu’en 1920, la firme franchit l’Atlantique pour participer au mythique Grand Prix d’Indianapolis, où elles remporteront, non seulement, la 2e, mais également les 5e et 7e place du classement général. L’année suivante sera, elle aussi, fort riche au niveau des victoires en compétition, avec celle au Grand Prix d’Italie, qui se disputait à Brescia, ainsi que les 2e et 3e places au GP de France. Des lauriers dont la firme ne se prive, évidemment, pas de faire état dans la presse automobile de l’époque. Même si ses voitures restent encore, pour l’heure, cantonnées au bitume des circuits ainsi qu’aux pistes des rallyes.

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Ce n’est que deux ans plus tard, en 1922, que le premier modèle « civil » est présenté au public. Bien qu’il s’avère, certes, moins ambitieux, puisque le modèle en question, la Ballot 2LT, se contente, ainsi, d’un quatre cylindres de 2 litres de 10/11 CV. Même si, là aussi, le raffinement technique n’est pas absent, bien au contraire, puisque celle-ci dispose de freins sur les quatre roues, complétés par un système d’assistance au freinage, d’une boîte à quatre vitesses et d’une distribution à arbre à cames en tête. A une époque où (il faut le rappeler) la grande majorité des modèles proposés dans sa catégorie doivent encore se contenter de freins montés uniquement sur les roues arrière et dépourvue de toute assistance, d’une boîte ne comportant que trois vitesses ainsi qu’une distribution à arbre à cames latéral. C’est à la lecture de ces comparaisons technique que l’on prend conscience que, sur de nombreux points, les modèles produits par les frères Ballot se montraient forts en avances sur la plupart de leurs rivales.

Au cours de cette décennie qui sera surnommée celles des Années Folles, la volonté de s’enivrer (à tous points de vue) afin d’oublier, ainsi, les horreurs de la Grande Guerre est aussi marquée par une économie florissante. Ce qui encourage évidemment les constructeurs spécialisés dans les voitures de sport et de prestige à jouer la surenchère à coups de modèles toujours plus imposants, rapides et clinquantes. A ce « jeu », Ballot ne cherche pas nécessairement à vouloir, à tout prix, parvenir en tête du peloton ou sur la plus haute marche du podium. Il n’en reste pas moins que la marque participe, elle aussi, à cette course à la puissance et au luxe. Se retrouvant, toutefois, d’une certaine façon, obligée de suivre le courant et, donc, d’y participer elle aussi, si elle veut pouvoir conserver la place qu’elle est parvenue à se faire sur le marché français. Et donc, ne pas risquer de se retrouver distancé par une concurrence aussi nombreuse que féroce.

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C’est ainsi que l’on verra, dans la seconde moitié des années 1920, les modèles de la marque augmenter en cylindrée et, par là même, en puissance. C’est ainsi qu’en 1927 est dévoilée le Type RH, lequel sera le premier modèle de la marque à recevoir un moteur 8 cylindres. Une nouvelle version de celui-ci, présentée dès l’année suivante (baptisée, en toute logique, Type RH2) voit sa cylindrée passée de 2 618 à 2 874 cc et sa puissance de 70 à 76 ch (même si la puissance reste la même, à savoir 120 km/h). La seconde évolution de la Ballot RH (le Type RH3 donc) voit la cylindrée du huit cylindres atteindre,à présent, la barre des 3 litres (3 051 cc exactement) pour 83 chevaux. Si la vitesse peut aller jusqu’à 125 km/h dans ses versions les plus légères, avec les carrosseries les plus imposantes et les plus lourdes, en revanche, celle-ci atteint les 105 km/h seulement. Le modèle étant, par ailleurs, proposé en deux longueurs d’empattement : « normal » de 3,33 m (comme sur les deux premières versions) et 3,61 mètres pour la version longue.

Présentée en 1929, la RH3 sera aussi, malheureusement l’ultime modèle à porter le nom de Ballot. A l’automne de cette année-là éclate, aux Etats-Unis, une crise économique sans précédent depuis les débuts de l’ère industrielle, un siècle plus tôt. Laquelle ne va pas tarder à se propager à l’Europe, entraînant la disparition d’un grand nombre de constructeurs, en particulier ceux produisant exclusivement des modèles de haut de gamme. Se retrouvant bientôt face à de graves difficultés financières, le constructeur est alors racheté par un autre grand nom de l’automobile de prestige, la firme Hispano-Suiza. (Laquelle produit, toutefois, aussi des moteurs d’avions, une activité prospère qui lui permet d’encaisser mieux que d’autres de ses concurrents les effets de la crise).

La première conséquence de l’entrée de cette dernière au sein du capital de la marque Ballot sera la présentation, au Salon automobile de Paris d’octobre 1930, de la Ballot HS 26. Ce modèle « hybride » reprend le châssis de la Ballot RH3, mais reçoit comme motorisation un six cylindres de 4,5 litres emprunté à l’Hispano-Suiza T64 produite à Barcelone, en Espagne.

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A peine un an plus tard, la firme à la cigogne prend entièrement le contrôle de Ballot et la HS 26 se voit alors rebaptisée Hispano-Suiza HS26 Junior. La production du Type RH3 prend, toutefois, alors fin et la marque Ballot disparaît alors du paysage automobile français (même si elle ne sera officiellement dissoute que sept ans plus tard, en 1938, après qu’Hispano-Suiza ait, finalement, revendue la marque à la SNECMA).

Philippe ROCHE

Photos via Wheelsage Wikimedia

Une autre histoire https://www.retropassionautomobiles.fr/2025/03/rolland-pilain-pionnier-automobile-tourangeau/

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