LEON BOLLEE - Le fils d'un pionnier.
Léon Bollée 45 50 HP 8.3 Litre - 1905

LEON BOLLEE – Le fils d’un pionnier.

Parmi les nombreux pionniers qui, en cette fin du XIXème siècle, ont décidé de se lancer dans l’aventure automobile figurent Amédée Bollée. Lequel va bientôt transmettre sa passion de ce nouveau moyen de transport qui va révolutionner le monde des transports à son fils, Léon Bollée.

Né en 1870 dans la ville du Mans, déjà célèbre à l’époque pour ses rillettes – si appréciées des amateurs de charcuterie en tous genres, mais pas encore pour son célèbre circuit automobile qui verra le jour par après -, le second fils d’Amédée Bollée montra, lui aussi, dès son plus jeune âge, un vif intérêt pour tout ce qui touchait au domaine de la mécanique.

LEON BOLLEE - Le fils d'un pionnier.
Léon Bollée Tandem

L’une de ses premières créations fut, notamment, une machine à calculer fonctionnant à l’aide d’une manivelle, pour laquelle il fut récompenser lorsqu’il la présenta à l’occasion de l’Exposition Universelle de 1889. Il ne déposa toutefois aucun brevet pour sa création, car son intérêt se porta très vite, tout comme son père, sur le domaine de l’automobile, alors naissante, ainsi que sur celui de la compétition cycliste. Léon Bollée est, en effet, un passionné de vélo, qu’il pratique abondamment, tout comme les deux-roues ainsi que les tricycles à moteru.

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Léon Bollée Tandem

A la différence de son père, fervent défenseur et pratiquant du moteur à vapeur, son fils Léon, de son côté, compris assez rapidement les limites de cette technique et s’orienta alors dans la voie du moteru à essence. Grâce au tricycle qu’il a réalisé, doté d’un moteur de sa conception et dont il a, cette fois, la bonne idée de déposer le brevet. Réussissant à intéresser un investisseur anglais qui lui achète – quasiment à « prix d’or » – les droits de fabrication de son engin, il se retrouve alors, à l’âge de 25 ans à peine, avec un magnifique d’une confortable petite fortune : 500 000 francs or.

Alors que d’autres hommes s’en seraient probabalement contenter pour mener confortablement, durant le reste de leur vie, une confortable vie de rentier, Léon Bollée, lui, toujours animé par sa passion de la mécanique, ne s’arrête pas là. Deux ans plus tard, sa nouvelle création prend, cette fois, la forme d’un quadricycle, dont les droits de fabrication sont acquis par Alexandre Darracq.

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Léon Bollée

Au moment où la France franchit le cap du XXème siècle, les véhicules qu’il conçoit alors se montre plus ambitieux, pour la taille de ses châssis ainsi que celle de ses moteurs. Manifestement inspiré par les nouveaux modèles de grosses cylindrées produits par certains constructeurs étrangers, notamment Mercedes en Allemagne. Selon lui, les modèles produits par la amrque à l’étoile indiquent clairement la voie à suivre. Dès 1901, il commence donc l’étude d’une nouvelle voiture de haut de gamme équipée d’une mécanique à quatre cylindres – ce type de motorisations étant alors réservé aux modèles de grosses cylindrées, à une époque où les automobiles les plus « populaires » se contentaient d’un simple monocylindre.

Présentée en 1903, la nouvelle voiture Léon Bollée ne manque pas de susciter l’intérêt d’une part importante du public au sein de la clientèle visée et même d’un certain nombre d’investisseurs potentiels, non seulement Français mais aussi étrangers. Parmi ces derniers, le plus important n’est autre que l’un des héritiers de la célèbre et richissime famille américaine Vanderbilt, qui a bâti sa fortune dans le domaine des chemins de fers. A tel point que ce dernier signe un contrat pour en devenir l’importateur exclusif aux Etats-Unis.

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Léon Bollée

Au sien de la nouvelle firme qui porte son nom, dont il est l’ingénieur en chef, Léon Bollée n’occupe toutefois, volontairement, qu’un poste d’associé minoritaire. Son intérêt et ses travaux portent, avant tout, voire uniquement, à tout ce qui à trait à l’ingénierie et à la mécanique et il n’a guère de gôut pour tout ce qui a trait aux tâches administratives – qu’il s’agissse de la gestion d’une entreprise de production d’automobiles ou de n’importe quel autre domaine -, pour lesquelles il a d’ailleurs sans doute conscience que ses compétences restent fort limitées.

Si les modèles de la marque Léon Bollée acquièrent, assez rapidement, une réputation enviable, que ce soit pour leur qualité de fabrication ainsi que leur silence de fonctionnement. Une qualité qui se paye toutefois par des prix de vente fort élevés ainsi qu’une production qui est – volontairement – limitée, celle-ci ne dépassant guère, en effet, à quelques dizaines de châssis chaque année, lesquels sont d’ailleurs, pour la plupart, vendus à l’étranger. Sorte de paradoxe ou d’ironie du sort, bien que jouissant alors d’une solide image de marque dans leur propre pays, les voitures de la firme Léon Bollée sont plus reconnues et appréciées à l’exportation.

LEON BOLLEE - Le fils d'un pionnier.
Léon Bollée

Ce succès permet, en tout cas, à Léon Bollée, d’inaugurer, en 1906, une nouvelle usine située aux Sablons, près du Mans. Là aussi, préférant se cantonner dans le domaine technique, il choisit d’y occuper, simplement, le poste de directeur technique. En plus de ses recherches et de ses expérimentations dans le domaine automobile, il élargit bientôt ses travaux à celui de l’aviation. Consécration, en 1908, il reçoit, en invité d’honneur, les frères Wright, pionniers américains de l’aviation, dans son usine du Mans et les convainc même de céder la licence de production de leur Flyer au gouvernement français.

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Léon Bollée

Cette année va toutefois marquer la fin de « l’âge d’or » pour les modèles de la marque Léon Bollée, en tout cas en ce qui concerne ses modèles de très haut de gamme. Si, jusqu’ici, celle-ci pouvait compter sur les marchés d’exportation, en particulier le marché américain, où ses imposantes automobiles de 30, 40, voire même 75 HP, étaient fort appréciées de la clientèle. Malheureusement pour le constructeur, ce succès a, manifestement, inspiré un certain nombre d’autres constructeurs en France qui ont alors compris, eux aussi, que l’exportation était fort utile, voire indispensable, pour pouvoir se développer et augmenter fortement et rapidement leurs ventes. La clientèle étrangère se retrouve alors face à une offre importante de nouveaux modèles et – assez logiquement – « l’effet de la nouveauté » va jouer en faveur de ces derniers. D’autant que la plupart d’entre-eux proposent des modèles qui affichent un rapport qualité/prix/performances nettement plus avantageux que les Léon Bollée.

La marque se voit alors obligée, afin d’assurer sa pérennité, de se développer sur le marché français, ce qui passe – obligatoirement – par un élargissement de la gamme vers le bas. Léon Bollée devient donc alors ce que l’on appelle aujurd’hui un constructeur « généraliste », avec, en entrée de gamme, des modèles de seulement 12, 15 et 18 HP, dont la cylindrée va de 2,4 l à 4 litres de cylindrée, soit bien en deçà de celle de ses premiers modèles. Si elle propose toujours à son catalogue des modèles de grand luxe dont le moteur peuvent atteindre jusqu’à 10 litres, ceux-ci ne connaissent toutefois plus, à présent, qu’une carrière assez marginale.

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Léon Bollée

En 1910, la gamme est presque entièrement renouvelée, même si elle demeure toujours vaste, proposant ainsi pas moins de neuf modèles, dont les deux derniers, qui trônent au sommet de la gamme, dipose de mécaniques dépassant les 10 000 cc. Ces derniers ne connaîtront toutefois qu’une diffusion assez confidentielle, l’essentiel de la production étant désormais constituée par le nouveau Type G1, qui affiche, modestement, une puissance fiscale de 12 HP. Celui-ci se contentant d’un moteur 4 cylindres en deux blocs de 2 230 cc développant une vingtaine de chevaux – ce qui, sur un châssis habillée des plus lourdes carrosseries de l’époque, comme une limousine – ne permet guère à la voiture de dépasser les 60 km/h. Bien que la plupart des constructeurs français de l’époque font souvent preuve d’une très grand « orthodoxie » ou « clacissisme » dans la conception technique de leurs modèles, les Léon Bollée s’affichent, d’emblée, parmi les plus conservatrices des automobiles françaises. La lecture de leur fiche technique permet de s’en rendre rapidement compte : soupapes monolatérales, régime moteur limité à 1 500 tr/mn, allumage par magnéto,.etc. Même sur ces nouveaux modèles, moins ambitieux que ceux de la grande époque, les châssis affichent, toutefois, souvent des dimensions généreuses : sur le Type G1, l’empattement atteint ainsi près de trois mètres, ce qui permet aux carrossiers qui travaillent dessus de réaliser pour les clients n’importe quelle carrosserie de leur choix.

Se voulant, sur bien des points, l’égal des meilleurs automobiles de l’époque, chaque châssis qui sort de l’usine du Mans fait l’objet d’une fabrication de tous les soins. Une fois terminé, ils sont ainsi longuement inspectés et testés, parfois durant plusieurs heures, avec d’en repérer et d’en éliminer le moindre bruit parasite. Le silence de fonctionnement étant l’un des points sur lequel Léon Bollée demeure le plus attaché et même intransigeant. Des méthodes similaires à celles alors en vigueur chez les constructeurs, français ou étrangers, les plus réputés – le silence de marche des voitures créées par Léon Bollée n’ayant ainsi rien à envier à celui d’une Rolls-Royce Silver Ghost. Des méthodes qui, évidemment, ne sont pas faites pour faire baisser les coûts de fabrication ni pour aider augmenter les cadences de production.

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Léon Bollée

Malgré toutes ces qualités, les modèles de la marque commencent sérieusement à marquer le pas, notamment sur le plan des performances, par rapport à une concurrence qui propose des modèles souvent tout aussi bien réalisé, ou quasiment, tout en étant plus performants et vendus à des prix moins élevés. Si la réputation que la firme est parvenue – en grande partie – à conserver lui permet de poursuivre la production de ses automobiles – dont les évolutions du Type G1, les modèles G2 et G3, celle-ci est désormais, clairement, sur le déclin.

L’apparition d’un nouveau modèle populaire de 10 CV fiscaux en 1912 ne suffira pas à redresser la situation car, dans cette catégorie – avant même l’apparition des premières voitures produites en grande série comme les premières Citroën -, la concurrence est déjà rude et la nouvelle Léon Bollée ne fait guère le poids face à des rivales nettement moins chères, comme les Lion Peugeot ou les Le Zèbre.

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Léon Bollée 20 30 HP – 1905

La disparition subite de son fondateur, en décembre 1913, ne va, évidemment, pas arranger cette situation. Ce dernier succombe, en effet, à une crise cardiaque, à l’âge de seulement 43 ans. Léon Bollée était affecté par des problèmes de coeur qui l’obligeront, au début des années 1890, à abandonner le sport cycliste sur les conseils des médecins. Auprès de ceux qui l’avaient connu, il laissa le souvenir d’un homme sûr de lui et au caractère souvent mordant. Aussi passionné qu’il ait été par l’ingénierie et par l’automobile, il n’a, pourtant et souvent, jamais fait preuve d’un très grand avant-gardisme dans les choix des solutions techniques qu’il fit pour ses voitures. Outre leur silence de fonctionnement, l’un des points sur lesquels il demeurait fortement attaché était leur simplicité de fabrication – la qualité de construction n’étant pas, à ses yeux, synonyme de complexité. Une anecdote qui l’illustre d’ailleurs bien est la réponse qu’il avait adressé à un client qui s’était plaint de la complexité de sa Rolls-Royce Silver Ghost : « De quoi vous plaignez-vous ? dit-il en parlant de celle-ci. On vous vend une voiture et l’on vous donne de quoi en faire deux ! ».

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Léon Bollée 45 50 HP 8.3 Litre – 1905

Après son décès, si sa veuve, Carlotta, décide de poursuivr l’oeuvre de son mari, la marque à laquelle il donna son nom se trouve alors, financièrement, en mauvaise posture. Sans le déclenchement de la guerre, à l’été 1914, il est probable qu’elle aurait, sans doute assez rapidement, dû mettre la clé sous la porte.

Comme toutes les usines françaises – quelles que soient leurs activités – l’usine du Mans va se retrouver mise à contribution et se reconvertie alors dans la production d’armement pour soutenir l’effort de guerre contre l’Allemagne. Cette reconversion forcée va permettre de fournir à l’usine des commandes et du travail bienvenues – celle-ci fonctionnant alors un rythme qu’elle n’avait sans doute jamais connu depuis sa création.

Une fois la paix revenue, à l’automne 1918, si, comme la grande majorité des autres constructeurs en France, la firme Léon Bollée se contente de relancer la production de ses modèles d’avant-guerre, ceux-ci se retrouvent fortement handicapés par le fait que, par les solutions techniques qu’ils emploient comme par leur rapport poids/puissance, ses modèles apparaissent déjà comme étant déjà – et fortement – dépassés.  Face aux nouveaux venus sur la scène automobile – comme Citroën, ainsi que les nouveaux modèles populaires produits par Peugeot et Renault -, les Léon Bollée d’entrée de gamme font désormais, véritablement, figure de « dinosaures ».

La marque finalement rachetée en 1922 par le constructeur anglais Morris et est alors rebaptsiée Morris-élon Bollée. Une gamme entièrement nouvelle est alors présentée, avec des modèles motorisés par des moteurs Hotchkiss. Malheureusement par la marque Léon Bollée, ceux-ci ne lui offriront, simplement, qu’un sursis. Bien que plus modernes que leurs devancières, ces nouvelles voitures ne parviennent guère à séduire la clientèle. La firme souffrant sans doute déjà d’une image trop « flétrie » ou « surranée » aux yeux de celle-ci pour pouvoir encore occupée la place qui était la sienne sur un marché automobile alors en pleine mutation, avec la montée en puissance des modèles de grande série. La production des dernières Morris Léon-Bollée cessant finalement en 1928 – au bout de trois ans à peine -, l’usine cessant, quant à elle, toute activité en 1931. Le nom de Bollée disparaissant alors définitivement du paysage automobile français.

Alexandre LAGARDE

Photos DR

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