AUSTIN / MG / ROVER METRO – Populaire mal-aimée.
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Contrairement à ce que l’on serait pourtant tenter de croire, les constructeurs ne sont pas toujours ravis lorsqu’un nouveau modèle connaît un succès qui dépasse leurs espérances. En tout cas sur le long terme. Non seulement parce qu’ils se doutent bien que ce succès ne sera sans doute pas éternel (même si, en général, ils font évidemment tout pour le faire fructifier et, surtout, pour le prolonger autant que possible), mais aussi parce que, lorsque vient le moment de se pencher sur l’étude de sa remplaçante, la direction du constructeur, tout comme les ingénieurs et les stylistes du bureau d’études, se retrouvent souvent dans l’expectative. D’une part car, en bons commerçants, ils tiennent à exploiter le filon que représente le modèle à succès jusqu’au bout mais aussi parce qu’ils savent (ou, en tout cas, se doutent bien) qu’il n’est jamais garanti que le nouveau modèle connaisse un succès comparable à celui de sa devancière (et encore moins qu’il dépasse cette dernière sur le plan des chiffres de ventes).
Ce sont sans doute les deux raisons principales pour lesquelles British Motor Corporation (rebaptisé British Leyland en 1968, après sa fusion avec le constructeur d’utilitaires Leyland) a (inconsciemment ou volontairement) laissé vieillir la célèbre Austin/Morris Mini (cette dernière fut, en effet, commercialisée, à son lancement en 1959, sous les noms de ces deux marques, les plus populaires du groupe britannique en terme de chiffres de ventes). Si, dans la première moitié des années 70, le célèbre « pot de yaourt » créée par Alec Issigonis est au fait de sa gloire, d’un point de vue commercial, elle ne se montre plus aussi rentable qu’auparavant pour son constructeur. Sans compter que les nuages s’amoncellent de plus en plus dans le ciel du groupe British Leyland, et que les temps va rapidement tourner à l’orage. Souffrant de plus en plus d’une gestion calamiteuse (due à son gigantisme, à un trop grand nombre de marques officiant dans les mêmes catégories de marché, de l’absence de synergie entre les différentes divisions du groupe), sans compter les grèves qui se multiplient dans la plupart des usines du groupe ainsi que les lancements ratés qui se multiplient pour un grand nombre des nouveaux modèles. Se retrouvant alors au bord du gouffre, British Leyland ne se voit sauvé du naufrage et de la faillite que par sa nationalisation par le gouvernement britannique en 1975.
En plus de tout cela, et malheureusement pour British Leyland comme pour la Mini, entretemps, la concurrence s’est réveillée et a fourbie ses armes, présentant, au cours des années 60 et 70, toute une série de citadines qui, sur bien des points, se révèlent plus modernes (de lignes comme de conception) que la petite puce anglaise (comme l’Autobianchi A112, la Peugeot 104, la Renault 5 ou encore la Volkswagen Polo). Si la Mini a toujours pour elle un très faible encombrement et une maniabilité hors pair, ces deux arguments ne peuvent plus suffire, à eux seuls, à lui assurer des ventes suffisantes. D’autant que la clientèle (britannique comme étrangère) réclame désormais plus d’habitabilité, ainsi qu’un coffre à bagages digne de ce nom et plus accessible (c’est-à-dire une voiture dotée d’un hayon, comme la plupart de ses concurrentes). Si le bureau d’études du groupe ne reste pas les bras croisés et travaille même ardemment, tout au long des années 70, à plusieurs projets pour une nouvelle citadine moderne destinée à remplacer la Mini. Toutefois, faute de volonté ou de moyens, ces derniers resteront sans suite. Il faudra attendre 1977, avec l’arrivée de Michael Edwardes, le nouveau PDG, nommé par le gouvernement anglais, pour que les choses bougent enfin et aboutissent, trois ans plus tard, en octobre 1980, à la présentation de l’Austin Mini Metro.
Si la nouvelle venue (connue en interne sous le nom de code ADO88/LC8) hérite du nom de sa glorieuse aînée, ce n’est, évidemment, pas anodin de la part de son constructeur. Outre que ce dernier cherche, par là, à afficher clairement, aux yeux du public, la filiation avec la Mini et, par ce moyen, faire profiter à la Metro de la célébrité de sa devancière (BMC avait d’ailleurs fait de même en 1959, lors du lancement de la Mini, dont le nom originel était Mini Seven, en référence à l’Austin Seven, produite entre 1928 et 1939, et qui peut être considérée comme la première voiture anglaise construite en grande série), British Leyland entend bien affirmer que ce nouveau modèle est appelée, à terme, à remplacer la Mini. (C’était, en tout cas, ce qui était prévue au départ, lors de sa conception et de son lancement). Elle n’en est d’ailleurs, sur bien des points, qu’une simple évolution plus moderne. Esthétiquement parlant, en tout cas, car sur le plan technique, elle emprunte un grand nombre d’éléments à sa devancière, à commencer par son moteur.
Lancé en 1952 (soit déjà vingt-huit ans de service à son actif sous le capot de la Mini, comme de nombreux autres modèles du groupe), le moins que l’on puisse dire est qu’il ne se caractérise pas vraiment par une modernité débordante (bloc à culasse en fonte, arbre à cames latéral, vilebrequin à trois paliers, carburateur à cloche SU, boîte de vitesses placée sous le moteur,…). Sur la Metro, il bénéficie tout juste d’une (très) légère modernisation (sous l’appellation « A+ »), avec des frottements réduits, un radiateur frontal et un ventilateur débrayable. En ce qui concerne les suspensions, la Metro se voit équipée du système « Hydragas » conçu en 1973 pour l’Austin allegro, avec des sphères remplies d’azote en guise de ressorts, en lieu et place des cônes de caoutchouc de la Mini. A la différence de l’Allegro, si le système d’interconnexion est conservé, il concerne ici les roues gauche et droite d’un même essieu et non plus les roues d’un même côté. Cette suspension (sorte de version « low-cost » de l’hydropneumatique mise au point par Citroën) ayant toutefois, depuis un certain temps déjà, montré ses limites (notamment sur mauvaises routes) par mesure de sécurité, les ingénieurs décident de lui adjoindre des amortisseurs à l’avant et de classiques ressorts à l’arrière (ce qui reflète bien le peu de confiance que les techniciens de British Leyland avaient dans l’Hydragas).
Pour ce qui est de la carrosserie, si les lignes de celles-ci, dessinées par David Bache (à qui l’on doit aussi la première génération du Range Rover et la Rover SD1) ne brillent ni par une élégance particulière ni par une originalité débordante, il est vrai qu’un designer (aussi talentueux qu’il soit) à moins l’occasion d’exprimer sa créativité sur une citadine populaire que sur une berline grande routière ou sur un tout-terrain de haut de gamme. La clientèle de ce genre de voitures privilégiant, de toute façon, l’aspect pratique et fonctionnel à toute considération esthétique. La carrosserie de la Metro offrant néanmoins l’avantage, outre ses dimensions compactes (3,40 mètres de long et &,54 m de large), d’une grande luminosité grâce à ses importantes surfaces vitrées.
Commercialisée sur le marché français en mars 1981, la Mini Metro y est proposée avec quatre motorisations : 1 000 cc de 41 ch, 1 100 cc (44 ch), 1 000 HLE de 47 ch (cette dernière se distinguant par son taux de compression plus élevé ainsi que sa boîte à étagement plus long) et 1 300 cc de 63 chevaux. Depuis sa nationalisation, cinq ans plus tôt, et surtout depuis le retour au pouvoir des Conservateurs, en 1979, avec à leur tête Margaret Tatcher (surnommée « la Dame de fer »), le groupe British Leyland voit ses finances surveillées de très près par le gouvernement britannique avant de débourser le moindre centime pour tout nouveau projet (même quand il ne s’agit que d’un simple changement de calandre ou d’enjoliveurs de roues). Spen King et Charles Griffin, les deux principaux ingénieurs en charge de la conception de la Metro se sont vu obligés de faire du neuf avec du vieux, faute de crédits suffisants pour un modèle entièrement nouveau. Toutefois, (sans doute, en grande partie, grâce au dynamisme et au talent de persuasion de Michael Edwardes), le gouvernement accepte néanmoins d’allouer de quoi moderniser les chaînes de production de l’usine Austin de Longbridge, avec de nouvelles chaînes de production automatisées. Une modernisation du processus de fabrication symbolisée, dans les brochures publicitaires, par de sympathiques et gentils robots entourant une Mini Metro gris métallisée (comme teinte de carrosserie, même pour une citadine populaire, il y avait probablement mieux à choisir) comme pour mieux souligner, aux yeux des acheteurs potentiels, la « modernité » (toute relative, en tout cas en ce qui concerne la fiche technique) de la voiture. Des robots qui, par leur silhouette, semblent tout droit sortis d’un jeu de Lego géants. Autre indication qui trahie les limites de la modernité de la Metro, les périodicités d’entretien assez courtes, la construction préconisant, en effet, un entretein général de la voiture tous les 20 000 kilomètres.
Si Austin et British Leyland avaient cru utile (voire nécessaire) de lui accoler le préfixe Mini afin, comme mentionné plus haut, de mieux établir la filiation avec sa célèbre devancière, celui-ci sera toutefois abandonné dès l’été 1981, seule l’appellation Metro étant, à présent, conservée. Un (léger) changement de nom dû, sans doute, du fait que les responsables de la marque se sont finalement convaincus que, étant donné que la Metro entendait incarnée la nouvelle citadine moderne et que la Mini, de son côté, (malgré le fait qu’elle ait déjà acquise, à cette époque, le statut de voiture culte et même si elle continue à jouir, au sein d’une grande partie du public, d’un succès fort enviable), aux yeux des dirigeants de British Leyland, comme de la clientèle, incarne aussi le passé. Pour que la Metro puisse atteindre les objectifs commerciaux espérés par son constructeur, il lui faut donc sortir de l’ombre de la Mini. Sauf que (contrairement à ce que croyait sans doute la direction du groupe BL) il faut, en général, du temps et, surtout, plus qu’un simple changement d’appellation pour parvenir à acquérir une identité propre et de n’être donc plus vue que comme une simple version modernisée de la Mini. Une image dont (malheureusement peut-être pour elle) la Metro ne parviendra jamais vraiment à se défaire.
En tout cas, malgré les espérances placées en elle par son constructeur et la mission qui lui a été confiée (à savoir ramener la marque Austin, ainsi que le groupe British Leyland, sur la voie du succès), la nouvelle citadine anglaise aura fort à faire, tant la concurrence (qui a rapidement profiter de l’affaiblissement du groupe BL/BMC) est rude, tant sur le marché britannique qu’à l’étranger (avec des rivales comme la Fiat 127, la Renault 5, la Peugeot 104, les Citroën LN et Visa ou la Ford Fiesta). La gamme s’élargie vers le bas avec le lancement d’une 1000 Special qui vient remplacer la 1000 « standard » comme version d’entrée de gamme (cette dernière étant toutefois maintenue au catalogue), affichant une finition assez austère (qui frise même l’indigence) : suppression de la tablette, du pare-soleil passager, simples sièges en skaï et volant à deux branches, avec, sous le capot, le moteur à haut taux de compression et la boîte longue de la version HLE. Au début des années 80, sur un marché qui peine encore à se remettre des deux crises pétrolières de la décennie précédente, les modèles proposés sur le marché des citadines se livrent une bataille acharnée pour revendiquer le titre de « Voiture la plus sobre du marché ». Si les catalogues ne se privent pas de mettre l’accent sur la faible consommation de la Metro, qui revendique 4,8 litres/100 km à la vitesse moyenne de 90 km/h, il semble toutefois que toutes les voitures sorties de l’usine de Longbridge ne fasse pas preuve de la même sobriété, la consommation de certaines d’entre-elles atteignant, en effet, la barre des 6 litres/100 km.
Si, grâce aux efforts réels et concrets entrepris par la nouvelle direction dans le but d’améliorer la qualité de fabrication des voitures ainsi que la modernisation de l’outil de production comme les conditions de travail des ouvriers, sous l’ère Tatcher, British Leyland n’en a toutefois pas encore fini avec ses vieux démons et les premiers mois de production de la Metro à l’usine de Longbridge sont marqués par plusieurs grèves et autres conflits sociaux ; A l’occasion du millésime 1982, la version 1000 « Standard » est rebaptisée 1000E et est sensiblement modifiée, avec la suppression du rétroviseur intérieur jour:nuit et reçoit à présent le volant à deux branches de la version Special (déjà vu aussi sur les Mini). Sur la 1300S, le toit ouvrant en verre démontable (un équipement typique de l’époque) qui équipait les premiers exemplaires disparaît lui aussi, ainsi que l’amusante sellerie à trois couleurs (qui était pourtant l’une des rares touches de gaieté et d’originalité que l’on pouvait trouver sur la Metro) ? A contrario, elle est maintenant disponible en boîte automatique (identique à celle qui est déjà montée sur les Mini). Si les catalogues portent encore l’appellation Mini Metro sur leur page de couverture, la présentation des brochures est désormais plus classique et plus sobre (les robots « Lego » des premiers catalogues ayant disparus des photos). Autre présentation typique de l’époque, les habitacles avec des selleries couleur « fauve » ou marron, ainsi que les appuis-tête ajourés, type « sécuritaire », qui ont l’air d’avoir été empruntés à une Volvo.
Si British Motor Corporation (l’ancêtre du groupe British Leyland) ne fut jamais, dans son ensemble, un champion de l’innovation et de l’avant-gardisme, il faut néanmoins leur reconnaître la paternité du concept de la citadine de luxe (avec la présentation, en 1963, des Vanden Plas 1100 et 1300, basées sur les Austin de la génération ADO16). En mai 1982, Austin remet ce concept au goût du jour avec la présentation de la Metro Vanden Plas. Si cette dernière est, certes, plus « chic » et mieux équipée que les autres versions du catalogue, la Metro Vanden Plas s’avère toutefois moins « opulente » que ses devancières des années 60, se contentant ainsi de jantes en aluminium équipées de pneus en 12 pouces, d’une calandre recevant un entourage chromé, des bandeaux en ronce de noyer sur les contre-portes, un volant spécifique à trois branches gainé de cuir, avec l’écusson « VP » au centre et, sous le capot, le moteur 1,3 l poussé à 71 chevaux.
Cette même année 1982 voit aussi la résurrection de la marque MG. Si cette dernière (qui était devenue, depuis l’avant-guerre, l’une des références de l’automobile britannique en matière de roadsters populaires, avec la lignée des modèles TD et TF) avait disparue en 1980, avec la fin de la production de la MG B (après dix -huit ans de carrière et 500 000 exemplaires sortis de chaîne), la marque à l’octogone (dont les initiales signifient Morris Garage, la firme étant, à l’origine, spécialisée dans la transformation des modèles du constructeur Morris en voitures de sport populaires) est pourtant ressuscitée à peine deux ans plus tard. Il n’est toutefois, à présent, plus question de mini-roadsters sportifs aux lignes aguicheuses, comme cela avait été le cas du temps des MG A et MG B (alors que ceux-ci constituaient pourtant « l’aDN » de la marque). A la place, et comme, depuis l’apparition, au milieu des années 70, de la Golf GTI, les petites bombinettes sont désormais à la mode, l’Austin Metro va, elle aussi, avoir droit à ses déclinaisons sportives, tout comme les autres modèles de la gamme Austin, les berlines compactes et familiales Maestro et Montego.
Si les « nouvelles » MG ne sont donc plus guère autre-chose que des versions vitaminées des Austin, la MG Metro, dans sa version initiale, tout du moins, n’est toutefois pas la plus puissante de sa catégorie. Plus que par ses performances, elle se caractérise surtout par sa décoration intérieure et extérieure, qui fait, elle, très « sport », avec son becquet arrière et ses jantes en aluminium empruntées (tout comme le moteur que l’on retrouve sous son capot) à la version Vanden Plas, ses ceintures et ses moquettes rouges et ses sièges baquets à passepoils assortis ; en plus du fait que le ramage ne se révèle pas vraiment à la hauteur du plumage, plus encore que sur les autres versions de la Metro, la suspension Hydragas montre, ici, clairement les failles et les limites de ce système. Celui-ci n’appréciant guère la conduite sur toute défoncée ni celle en mode « virile » ainsi, non plus, que les régimes élevés. Sur le plan des performances, il faudra attendre le lancement de la MG Turbo, mise au point avec l’aide de lotus, développant près de 100 chevaux (94, très exactement) grâce au montage d’un compresseur Garrett, soufflant à travers le carburateur. (Ce qui représente néanmoins un exploit sur un moteur dont la conception, il faut le rappeler, remonte au début des années cinquante). La Metro Turbo se distingue de la MG Metro « classique » (que la version Turbo ne remplace toutefois pas et qui reste toujours disponible au catalogue), sur le plan esthétique, par ses bas de caisse noirs où figure son nom apposé en lettres rouges et ses jantes en aluminium chaussée de pneus en 13 pouces. (En plus de son turbo, elle reçoit aussi une suspension durcie par rapport à celle des autres versions).
Outre l’apparition de la Turbo, le millésime 1983 voit aussi la suppression de la gamme de la version 1000 « standard » de 41 ch, seule la version à taux de compression élevé (47 ch) restant disponible pour le moteur d’un litre (une motorisation qui équipe également les Special et HLE. Cette dernière remplaçant, quant à elle, la 1300S, avec un moteur dont la puissance se voit rabaissée à 59 chevaux. Une nouvelle version fait aussi son apparition à la même époque, la 1000 LE, basée sur la version L et qui, grâce à un pont allongé, voit sa consommation abaissée à 4,4 l/100 km (une consommation dont le calcul se base toujours sur des mesures à une vitesse de 90 km/h). La tenue de route, quant à elle, se voyant (légèrement) améliorée grâce au montage d’une barre antiroulis à l’avant. L’équipement de série se voit (là aussi, légèrement) enrichi avec des glaces de custode entrebaillantes à partir du niveau de finition L et un rétroviseur à réglage intérieur à partir de la finition HLE. Sur les catalogues, dont la présentation se veut, à présent, plus recherchée et un peu plus « cossue », les photos sur fonds blanc ou noir prises en studio, donnant une ambiance un peu trop « cheap » ou austère (hormis celle avec les robots sur les premières brochures de lancement de la Metro), même pour une citadine populaire, faisant appel à des photos prises en extérieur (avec une ambiance un peu style « New York by night »).
Ce sera durant l’année-modèle 1984 que la Metro connaîtra son record de production, avec un peu plus de 180 000 exemplaires produits. Un score assez satisfaisant qui (rançon d’une gestion beaucoup plus saine et vigoureuse du groupe British Leyland) est aussi à mettre au crédit d’un climat social devenu beaucoup plus serein au sein de l’usine. Si, sur le plan de la qualité de fabrication et de la fiabilité, si les progrès réalisés par rapport à ses devancières des années 70 sont bien réels, les Austin et MG Metro sont toutefois encore assez loin, sur ce point, d’atteindre le niveau de leurs concurrentes allemandes ou japonaises. Si la nouvelle petite citadine, malgré les vicissitudes auxquelles doit, par moment, encore faire face le groupe BL, peut se prévaloir de chiffres de vente assez honorables, ceux-ci restent pourtant assez loin de ceux de sa devancière. Il faut, en effet, rappeler qu’entre 1962 et 1978, la Mini atteignait souvent la barre des 300 000 voitures par an (soit presque deux fois plus que ceux de la Metro) au début des années 70. Une preuve tangible de l’érosion fort importante du groupe British Leyland sur le marché des voitures populaires (au Royaume-Uni comme à l’étranger), résultat de la gestion chaotique (conséquence, elle-même, de l’organisation tentaculaire et des trop nombreuses filiales du groupe) qui ont, évidemment et rapidement,eu pour résultat, auprès de la clientèle, une forte dégradation de l’image du groupe et de ses modèles. Une image de « pièges à chagrins » dont les modèles et marques survivantes du groupe britannique, malgré tous les efforts réels entrepris par les nouveaux dirigeants de British Leyland, ne parviendront jamais entièrement à se défaire, et donc les conséquences se feront encore ressentir après la disparition de celui qui fut l’un des plus importants groupes automobiles non seulement au Royaume-Uni mais aussi au niveau mondial.
L’année 1983 verra aussi la disparition des versions 1000L et 1300 HLE, ainsi que le montage, sur tous les autres modèles de la gamme Metro, de nouveaux pneus Dunlop TD, qualifié par leur fabricant de roues indéjantables. Un genre de pneumatique assez atypique, inspiré des Michelin TRX et fabriquées, tout comme ces derniers, en taille millimétrique (et non pas en pouces comme sur les pneus ordinaires). Monter de telles roues sur un modèle qui se présentait comme une citadine populaire apparaissant comme un choix pour le moins « osé » (même s’il faudrait plutôt dire aberrant). La Metro Vanden Plas, qui occupe (avec les MG Metro et Metro Turbo) le rôle de modèle haut de gamme du catalogue, quant à elle, si elle perd ses jantes en aluminium, reçoit en revanche, à présent, un habitacle plus cossu, grâce à une nouvelle sellerie en cuir.
C’est à l’occasion de la présentation des modèles du millésime 1985, lors du Salon automobile de Birmingham en 1984, que la Metro connaîtra la seule vraie évolution esthétique de sa carrière. Les nouveaux modèles se distinguent des précédents par leur capot redessiné et plus plat, des pare-chocs retouchés et plus résistants, une calandre elle aussi redessinée et des phares ainsi que des clignotants aux angles plus arrondis. A l’intérieur, le conducteur bénéficie d’une nouvelle planche de bord et ce dernier, ainsi que ses passagers, de réglages de ceinture en hauteur, de vitres électriques sur la version Vanden Plas et d’un système de verrouillage centralisé (sur la VP, la MG et la nouvelle Mayfair, qui vient de faire son apparition au catalogue). Il est à noter que ces modifications esthétiques (dans l’ensemble assez mineures, mais qui semblent suffisantes aux yeux du constructeur pour justifier l’appellation « phase II ») ne concernent que les Metro « haut de gamme », les versions de base (Commerciale, Special et E) conservent, elles, la face avant des premières Metro, avec leur calandre au dessin simplifié, leurs phares placés en retrait et leurs clignotants placés dans le pare-choc (à côté des phares pour les modèles « phase II »). En ce qui concerne la nouvelle Mayfair, celle-ci reprend au sein de la gamme le rôle tenu auparavant par l’ancienne 1000 HLE.
L’autre grande nouveauté de l’année-modèle 1985 sera la présentation d’une nouvelle carrosserie à cinq portes (qui sera, à présent, la seule proposée avec la finition Vanden Plas). En ce qui concerne la partie technique, la Metro connaît, là aussi, plusieurs modifications : nouveau réservoir de carburant dont la capacité passe désormais à 35 litres et freinage à disques ventilés à l’avant, similaires à ceux montés sur la MG Metro Turbo.
A partir du millésime 1987, cette dernière devient d’ailleurs la seule Metro disponible au sein de la gamme MG, la version atmosphérique disparaissant, en effet, du catalogue. La gamme Austin se réduit elle aussi, les versions 1000 E et Le n’étant désormais plus disponible, cédant leur place à la Special dans le rôle de modèle d’entrée de gamme, cette dernière étant maintenant disponible avec la carrosserie 5 portes). La Mayfair, de son côté, reçoit à présent sous son capot le moteur 1 215 cc de 59 ch de l’ancienne 1300 HLE, celui-ci équipant aussi la nouvelle version de la Metro qui rejoint cette année-là le catalogue, la Surf (disponible en 3 ou en 5 portes).
C’est en novembre de la même année que la Metro atteint la barre (fort symbolique et même importante pour un modèle populaire) du million d’exemplaires produits. Si, surtout à son lancement, par ses atouts pratiques, son caractère économique, ses dimensions compactes et ses lignes modernes, l’Austin Metro avait de quoi séduire une grande partie de la clientèle populaire, elle se retrouvera très vite handicapée face à la concurrence étrangère, par sa mécanique désuète (pour ne pas dire archaïque) et sa boîte de vitesses qui l’était tout autant. Déjà quelque peu démodée d’un point de vue technique au moment de son lancement, elle ne pouvait donc, sur ce plan, que vieillir rapidement et aura donc assez bien du mal à soutenir la comparaison face à des rivales comme l’Opel Corsa, la Ford Fiesta, la Fiat Uno ou la Volkswagen Polo, qui pouvaient, elle, se prévaloir d’une fiche technique plus moderne. Si, pendant longtemps, aux yeux de la clientèle populaire, la fiche technique n’a jamais été le point le plus important au moment de choisir sa future voiture, ces acheteurs ayant finalement comprisq u’un trop grand archaïsme technique pouvait parfois avoir un impact assez négatif sur la fiabilité de la voiture, beaucoup d’entre-eux consultent désormais celle-ci avec plus d’attention qu’auparavant. Ce qui, bien souvent, ne favorise guère la petite anglaise. D’autant que la presse automobile, de son côté, ne se prive pas, elle non plus, de pointer du doigt sa mécanique presque « hors d’âge » et sa finition très moyenne, qui, sur la plupart des versions (hormis celles de haut de gamme comme la Vanden Plas) se révèle même similaire à celle des voitures des pays de l’est.
Si c’est en 1986 qu’elle enregistrera son meilleur score de ventes sur le marché français, avec un peu plus de 18 700 exemplaires vendus cette année-là dans l’hexagone, ses concurrentes françaises dans la même catégorie font souvent bien mieux. Même une doyenne comme la Renault 4 (dont le lancement, il faut le rappeler, remonte à 1961) la surclasse sans peine puisque cette dernière, à la même époque, se vend encore à environ 25 000 exemplaires par an.
A l’été 1987, la version Surf reçoit la nouvelle appellation Sprite, tandis que la version à transmission automatique devient un modèle à part entière (disponible uniquement avec la carrosserie trois portes). Sur le plan industriel, l’ex-groupe British Leyland, rebaptisé entre-temps Austin Rover Group, est reprivatisé. Le gouvernement de Margaret Tatcher jugeant, en effet, que celui-ci a retrouvé une situation financière suffisamment stable pour que l’Etat n’ait plus besoin d’en assurer la tutelle. L’autre (et aussi, sans doute, la principale) raison étant que Margaret Tatcher a été réélue et que le Parti Conservateur a mis en place depuis son arrivée au pouvoir, en 1979, un programme ultra-libéral dont l’un des points-clés est la non-intervention et même le désengagement de l’Etat dans les affaires économiques du pays. Le gouvernement va rapidement procédé à la vente, au bénéfice du secteur privé, de la plus grande partie des entreprises dont l’Etat était jusque-là l’actionnaire majoritaire. (Il en sera ainsi, à titre d’exemple, des chemins de fer). Austin Rover Group est alors revendu à l’entreprise British Aerospace. Toutefois, le nouveau repreneur ne consentira jamais à réaliser les investissements, certes importants mais nécessaires à la modernisation des modèles du groupe ainsi que de l’outil de production. British Aerospace étant (comme son nom le laisse deviner) avant tout spécialisé dans le secteur de l’aviation et de l’aérospatiale, l’automobile n’ayant toujours été pour lui qu’une activité secondaire, elle avait sans doute d’autres priorités que d’investir (ou d’engloutir) des millions de livres sterling pour restaurer ce qui était, certes, autrefois, l’un des anciens fleurons de l’automobile britannique, mais qui, sur bien des points, n’était alors plus qu’une ruine. Ce désintérêt de la part de British Aerospace pour le groupe Austin Rover sera d’ailleurs tel que six ans à peine après l’avoir racheté à l’Etat britannique, il le revendra à BMW.
En 1988, la marque MG disparaît à nouveau (avant de réapparaître quatre ans plus tard, avec la MGR V8, une version modernisée de la MG B équipée d’un V8 Rover, et, surtout, en 1995, avec la MG TF à moteur arrière), la MG Metro étant alors remplacée, dans le rôle de la version sportive de la gamme, par la 1275 Sport. Cette dernière se montre toutefois moins performante, puisqu’elle doit se contenter de la mécanique de la version atmosphérique de la MG (70 ch seulement, contre 93 pour la Turbo). Sa présentation, intérieure comme extérieur, se montrant aussi plus simple et plus sobre que celle de sa devancière : enjoliveurs de roues spécifiques et des bandes rouges et grises sur les flancs. En dehors de cela, elle ne se distingue toutefois guère, extérieurement, des autres modèles de la gamme. Se trouvant depuis quelques temps déjà sur la sellette, la marque Austin, qui fut, durant son âge d’or (des années trente aux années soixante) non seulement l’une des marques britanniques les plus populaires mais aussi l’un des plus importants constructeurs mondiaux, disparaît à son tour, dans le courant de l’année 1988, dans la plus grande discrétion, voire presque dans l’indifférence générale. Austin rejoint alors les (nombreuses) autres divisions du défunt groupe BMC/British Leyland dans le cimetière (pourtant déjà bien encombré) des constructeurs disparus, après Riley, Wolseley, Morris et Triumph. La disparition de la marque qui l’a vu naître ne marquera toutefois pas (en tout cas dans l’immédiat), la fin de carrière de la Metro, celle-ci étant alors intégrée à la gamme de la marque Rover.
Si elle fut, en son temps, l’une des divisions les plus importantes de l’ex-groupe British Leyland, la firme au drakkar était toutefois spécialisée depuis l’après-guerre dans les berlines de luxe de catégorie dite « intermédiaire » (en terme de taille) qui étaient destinée à concurrencer des modèles comme les Daimler d’entrée de gamme, les Humber (la division de prestige du groupe Rootes) ou encore les Ford Zodiac. Tranchant radicalement avec les habitudes et la politique commerciale de la plupart de ses concurrents, Rover pratiquait alors, depuis le lancement de la P4, en 1948, la politique du modèle unique. Une tradition qui perdurera jusque dans les années 80. Depuis lors (victime elle aussi, comme tant d’autres, de la faillite de British Leyland et du rationnement des investissements décidé par le gouvernement britannique, Rover s’était vue obligée de s’associer avec le constructeur japonais Honda et d’ouvrir son catalogue à de nouveaux modèles inspirés de ceux de la marque nippone. Si certains d’entre-eux, comme la Série 200, affichaient un caractère plus populaire que les anciennes P4, P5 et P6 ou encore la SD1 ou la nouvelle Série 800. Néanmoins, de là jusqu’à aller à inclure dans sa gamme des citadines populaires comme celle qui était destinée, à l’origine, à remplacer la Mini, il y avait un pas que la firme au Drakkar, si les circonstances ne l’y avaient pas contraint, n’aurait probablement pas franchi de lui-même. Alors que la Metro approchent maintenant des dix ans d’âge et peine de plus en plus à masquer ses rides. Les seules différences notables qui permettent de différencier les « nouvelles » Rover Metro et les anciennes Austin (outre l’emblème du drakkar qui figure désormais sur la calandre à la place du rectangle aux bandes bleues striées du logo d’Austin) sont des phares et une calandre sensiblement retouchées, des pare-chocs peints de la couleur de la carrosserie (jugés sans doute plus modernes et élégants que ceux en plastique noir mat des anciens modèles), renforcés sur tout leur contour par une bande de caoutchouc, ainsi que de nouveaux enjoliveurs de roues au dessin inédit. En ce qui concerne les différents modèles et niveaux de finition, en dehors de la disparition de la MG Metro Turbo, le seul changement significatif par rapport à la gamme du millésime précédent est la Mayfair qui est maintenant rebaptisée GS. Signe qui trahit bien le statut « d’enfant non désiré » au sein de la gamme Rover, si le sigle de la marque est bien présent sur les voitures qui illustrent le catalogue de l’année-modèle 1989, en revanche, le nom du constructeur n’est mentionné nulle part dans le catalogue dédié à la Metro. Ni en couverture ni dans aucune des pages de la brochure. La Metro ne connaîtra, en tout état de cause, qu’une carrière fort courte sous la marque Rover (tout du moins dans sa version originale), puisqu’elle quittera la scène dès l’année suivante.
Au total, en dix ans de carrière, l’Austin/MG/Rover Metro aura été produite à environ 1 600 000 exemplaires, toutes versions confondues (dont 140 000 seulement auront toutefois été vendues sur le marché français). La Metro n’est toutefois pas encore entièrement ni définitivement enterrée, puisqu’elle réapparaîtra, peu de temps après, sous la nouvelle appellation Rover série 100. Bien que la ligne ait été modernisée et même si elle ne partage plus aucun panneau de carrosserie en commun avec son aînée, la filiation entre les deux modèles apparaît assez évidente. Même si elle a aussi été sensiblement modernisée sur le plan technique, la petite Rover ne peut guère soutenir la comparaison avec des rivales plus modernes. Elle ne mènera donc qu’une carrière en demi-teinte jusqu’à sa disparition en 1998. La célèbre Mini, de son côté, nantie de son aura de modèle culte (même si elle a désormais perdue son caractère populaire et, dans ses dernières années, sera vendue à des tarifs qui n’étaient plus franchement très démocratiques) et, en une sorte d’ultime pied de nez à l’histoire et à tous les modèles qui prétendaient lui succéder (voire la détrôner), elle ne quittera finalement la scène qu’en l’an 2000, à l’aube du 21ème siècle, au terme d’une carrière de longue de plus de quarante ans.
Maxime Dubreuil
Photos Wheelsage
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