CITROËN AMI 8 et AMI SUPER - L'oeuvre de Bertoni, la part d'Opron.

CITROËN AMI 8 et AMI SUPER – L’oeuvre de Bertoni, la part d’Opron.

Bien que, sur le plan commercial, 1964 fut une année assez fructueuse pour la marque aux chevrons, celle-ci sera, toutefois, endeuillée par la disparition, au mois de février, de celui qui était le patron du bureau de style de la firme de Javel, le styliste d’origine italienne Flaminio Bertoni.

Choisi pour lui succéder, Robert Opron aura pour première et principale mission, outre de rajeunir quelque peu les lignes de la DS (avec la nouvelle face avant dotée des quatre phares directionnels) ainsi que de (tenter) de mener à bien le (calamiteux) Projet F (dont la conception et la mise au peint deviendront rapidement un véritable chemin de croix, au point que Citroën finira par jeter l’éponge à quelques mois seulement de la date programmée pour sa mise en production), celle d’offrir également une « opération de chirurgie esthétique » à l’Ami 6.

Dire que le style assez « atypique » (pour dire le moins) de cette dernière n’a jamais vraiment fait l’unanimité  tient sans doute de l’euphémisme, qu’il s’agisse du public, de la presse automobile, mais aussi (ou surtout?) des dirigeants de Citroën eux-mêmes (notamment de son PDG de l’époque, Pierre Bercot, qui avait pourtant donné son feu vert à sa commercialisation).

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Bien que, toute Citroën qu’elle fut, elle faisait donc véritablement figure, aux yeux d’une grande partie du public « d’OVNI » sur roues et qu’elle était affichée à un prix de vente plus élevé que celui de la plupart de ses concurrentes, elle parviendra toutefois, sans trop de mal, à trouver sa clientèle (même s’il est vrai que la version break, plus « consensuel » dans le dessin de sa partie arrière (débarrassée de la lunette arrière inversée qui fit couler beaucoup d’encre) représentera rapidement la plus grande partie des ventes). En outre, il n’est pas inutile de mentionner (ou de rappeler) que de tous les modèles qu’il avait créé pour Citroën, Bertoni considérait l’Ami 6 comme son chef d’oeuvre. Même si la version break a donc fortement contribué au succès commercial de l’Ami 6, en 1966, celle-ci deviendra, en tout état de cause, la voiture la plus vendue sur le marché français.

Bien qu’elle ait donc réussi à faire jouer son droit à la différence, tout du moins sur sa terre natale, en dehors des frontières de l’Hexagone, la partie est, toutefois, plus difficile à jouer, son style y apparaissant, en effet, bien trop déroutant, aux yeux d’une part importante du public, lequel lui préfère nettement les lignes, bien plus consensuelles de la Renault 4 ou de la Simca 1000.

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Faute de pouvoir encore disposer d’une véritable berline de taille moyenne à son catalogue (même si, après l’abandon précipité du Projet F, un nouveau modèle similaire, recevant la dénomination Projet G, est alors mis en chantier, il ne pourra, toutefois, être commercialisé avant 1970), la marque aux chevrons n’a alors guère d’autres choix, afin de faire patienter la clientèle, que de remodeler les lignes de l’Ami 6, ce qui, aux yeux de la direction de Citroën, lui permettra ainsi, non seulement, de mieux se faire une place sur les marchés étrangers, mais également de renforcer sa position sur sa terre natale.

Si, vue de face, la nouvelle venue reste fort similaire, dans ses traits, à sa devancière, le nouveau modèle reçoit, toutefois, un nez plus épuré, à présent débarrassé du capot en creux « tombant comme une crêpe » entre les phares et les ailes ainsi qu’au-dessus de la calandre, tout comme de la protection tubulaire en forme de « U » placée devant la calandre. Bien que son « visage », avec ces optiques rectangulaires, si atypiques au sein de la production automobile française des années 60, rappelle donc, au premier coup d’oeil, l’Ami 6 (ce qui était sans doute voulu de la part de Robert Opron, lequel tenait à ne pas trop « dénaturer » les lignes de celle qui fut la dernière oeuvre de son illustre prédécesseur, Flaminio Bertoni). A l’autre extrémité de la voiture, le nouveau patron du style de Citroën a aussi fait rentrer la nouvelle Ami « dans le rang », en lui faisant abandonner sa lunette inversée pour une poupe de style « fastback » plus classique. (Malgré cette silhouette « bicorps », la nouvelle Ami reste, toutefois, dépourvue de hayon et doit donc toujours se contenter d’une malle de coffre « »classique ». Les dirigeants de Citroën de l’époque considérant encore, en effet, que le hayon était réservé aux véhicules utilitaires).

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L’intérieur recevant, lui aussi, un « léger » lifting, avec une nouvelle planche de bord inspirée de celle de la Dyane ainsi que quelques améliorations bienvenues comme le montage d’un Neiman permettant ainsi de se passer de la tirette de démarreur (un héritage de la 2 CV).

En ce qui concerne la fiche technique, en revanche, l’Ami 8 (une dénomination choisie en référence aux huit glaces latérales de la voiture) reste quasiment identique à l’ancienne Ami 6, le seul changement notable consiste dans le montage d’une barre antiroulis à l’avant.

S’agissant du reste de la carrosserie, l’Ami 8 se différencie de l’Ami 6 par un pare-brise de plus grande taille, des flancs plus lisses ainsi que des poignées de porte encastrées. A son lancement, en mars 1969, elle n’est d’abord, proposée qu’avec la carrosserie berline, en deux niveaux de finition : Confrot et Club. (Cette dernière se distinguant de la première par ses entourages de glaces en inox, ses baguettes latérales, sa sellerie mixte mélangeant le tissu et le simili-cuir, ses sièges à dossiers inclinables, la moquette recouvrant le plancher ainsi que le garnissage du compartiment à bagages). Conservant le système de freinage, si, durant les premiers mois de sa carrière, elle conserve encore des freins à tambours sur les quatre roues, elle bénéficiera toutefois, dès le mois de juillet de la même année (soit quatre mois après sa commercialisation) de freins à disques à l’avant. En novembre de la même année, la carrosserie break fait son apparition au catalogue et remplacera alors, progressivement, la version similaire de l’Ami 6.

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Dans l’ensemble, la Citroën Ami 8 ne connaîtra guère d’évolutions notables durant ses près de dix ans de carrière. Bien que chaque millésime apportera son lot de changements, la plupart d’entre-eux, qu’ils soient techniques ou esthétiques, resteront assez mineurs.

Au début de l’été 1970, les portières avant abandonneront les glaces coulissantes au profit de nouvelles glaces descendantes, ce qui entraînera une modification des contre-portes, avec la suppression des vide-poches (y compris sur les portières arrière) et l’emblème avec le double chevron au centre de la calandre. Si le rétroviseur extérieur (un seul, côté conducteur, la législation de l’époque n’obligeant pas encore au montage d’un second rétroviseur côté passager) était monté de série sur le break dès le lancement de ce dernier. La berline, quant à elle, n’y aura droit en série qu’à partir de septembre 1971. A la même époque, l’Ami 8 reçoit (sur toutes ses versions) le montage de nouveaux amortisseurs d’origine Boge. Un an plus tard (exactement), en septembre 1972, le système d’alimentation reçoit un nouveau carburateur « antipollution ». En janvier 1973, elle reçoit un nouveau volant en mousse de diamètre plus réduit. La finition Club disparaissant alors de la gamme.

A l’été de cette année-là, les essuies-glaces abandonnent leur revêtement chromé au profit du noir mat. Au début de l’automne, elle adopte une nouvelle planche de bord, de couleur « havane », des clignotants blancs (orange précédemment) ainsi qu’un nouveau système d’éclairage de l’habitacle actionné par l’ouverture de la portière côté conducteur. En octobre 1975, la version Service vitrée, variante utilitaire à trois portes du break Ami 8, est supprimée de la gamme. Un peu moins d’un an plus tard, en septembre 1976, la face avant adopte une nouvelle calandre ainsi qu’un tableau de bord revêtu de noir, des sièges séparés à l’avant (en remplacement de la traditionnelle banquette arrière) ainsi qu’une banquette rabattable sur toute la gamme. En juillet de l’année suivante, toutes les versions se voient équipées de ceintures de sécurité à enrouleur, afin de répondre aux nouvelles normes en matière de sécurité.

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Ce sera, toutefois, la dernière modification notable que connaîtra la dernière modification notable que connaîtra la Citroën Ami 8 avant l’arrêt de sa production, moins d’un an plus tard, en juin 1978 (même si quelques exemplaires seront encore assemblés pour l’exportation jusqu’à l’année suivante). A l’image de sa devancière, l’essentiel des ventes sera constitué par le break.

Si la finition Club avait disparu sur l’Ami 8, c’est, en grande partie, dû à l’apparition de l’Ami Super. Bien que celle-ci reprenne l’ensemble de la carrosserie de l’Ami 8, elle abandonne, toutefois, le bicylindre de cette dernière au profit du quatre cylindres à plat de la GS. C’est pourquoi elle sera quasiment présentée par le constructeur comme un modèle bien spécifique et non comme une nouvelle version de l’Ami 8. Le lancement de la nouvelle compacte de Citroën permettant (enfin) à celle-ci de disposer de combler le trou important qui était présent depuis (trop) longtemps déjà entre l’Ami 6 (et ensuite l’Ami 8) et la gamme D (ID et DS). Néanmoins, il subsiste encore une place, au sein du catalogue de la marque, pour un modèle qui allierait une carrosserie compacte (celle de l’Ami 8) et un « gros » moteur (celui de la GS).

Le bureau d’études ayant rapidement compris que la combinaison des deux permettrait de disposer d’un modèle alliant la compacité aux performances (dont, sans doute, l’appellation « Super » qui sera accolée à celle d’« Ami »). En outre (et de manière plus pragmatique), étant donné que la GS venait d’adopter, dans ses nouvelles versions, une mécanique affichant une cylindrée de 1,2 litre, au lieu de 1 l à son lancement, cela permettait également à la firme d’écouler les stocks restants de la version originelle du moteur de la GS. Cette dernière léguant aussi à l’Ami Super sa boîte de vitesses, elle bénéficie également d’une plateforme, d’une suspension (dont on peut regretter qu’elle n’ait pas été équipée, contrairement à la GS, de l’hydropneumatique) ainsi que d’un système de freinage renforcé.

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Si, comme l’espérait son constructeur, l’Ami Super peut se prévaloir de très bonnes performances pour sa catégorie (la puissance passant ainsi de 35 ch sur l’Ami 8 à 61 chevaux sur l’Ami Super, soit près du double!). Même si celles-ci s’accompagnent, également, d’une consommation jugée un peu trop élevée pour un modèle compact (surtout dans un contexte de crise pétrolière). Ce qui explique probablement que, malgré un tarif assez compétitif (le prix de base étant fixé à 11 600 F, contre un peu plus de 13 000 F pour une Peugeot 204), elle ne connaîtra qu’une carrière plutôt discrète et qui sera, aussi, assez courte. Elle quittera ainsi la scène en février 1976, après un peu plus de 44 000 exemplaires (près de 24 800 pour le break et un peu plus de 19 200 pour le break).

Si elle connaîtra un meilleur succès à l’étranger que l’Ami 6 (donnant ainsi, manifestement, raison aux dirigeants de Citroën, qui souhaitaient offrir à l’Ami 8 une ligne moins « radicale » que celle imaginée par Bertoni), elle n’atteindra, toutefois, pas les mêmes scores de vente, puisqu’elle aura été produite, au total, à un peu plus de 729 300 exemplaires pour l’ensemble des modèles bicylindres (contre un peu plus de 1 035 000 exemplaires pour l’Ami 6), même s’il faut reconnaître que ce score n’a rien de déshonorant pour autant. Preuve qu’elle aura réussi, sans trop de mal, à trouver son public en dehors des frontières de l’Hexagone, 40 % de la production trouva preneurs à l’étranger.

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Outre l’usine belge de Forest, elle sera également produite à Vigo, en Espagne, au Portugal ainsi qu’en Yougoslavie. Hors de l’Europe, l’Ami 8 sera aussi assemblé (à partir de lots de pièces détachées venues de France) en Argentine, en Equateur, au Paraguay et en Uruguay pour l’Amérique du Sud. En Afrique, sa production sera assurée en Tunisie, au Bénin ainsi qu’à Madagascar.

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Si la berline Ami 8 sera remplacée par la nouvelle Visa, la version break, quant à elle, curieusement, n’aura, toutefois, pas de descendance directe. Cette dernière héritera, sur ses versions d’entrée de gamme, de la mécanique de l’Ami 8, prolongeant ainsi, en parallèle de la 2 CV, la lignée des Citroën à moteurs bicylindres. Même s’il est vrai que la Visa s’inscrit plus dans la catégorie des citadines. Ce n’est qu’en 1991, avec la ZX, que la marque aux chevrons fera véritablement son retour sur le segment des modèles compacts.

Philippe ROCHE

Photos Wheelsage

En vidéo https://www.youtube.com/watch?v=MfxdAUj7RAk&ab_channel=France3GrandEst

Découvrez l’Ami 6 https://www.retropassionautomobiles.fr/2024/05/citroen-ami-6-le-testament-de-bertoni/

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